Couverture française
Cinéma de genre au féminin - le | Cinéma de genre au féminin - le | 2023
Date de parution (France)
Pages

148

Couleur ?
Non
Langue

français

Cinéma de genre au féminin - le

Cinéma de genre au féminin - le

Films fantastique, d'horreur ou de science-fiction : le cinéma de genre a longtemps été chasse-gardée des réalisateurs masculins. Mais aujourd'hui le genre se conjugue aussi au féminin. Rencontres avec des réalisatrices françaises de tous âges et d'horizons différents,qui bousculent les codes : Coralie Fargeat, Lucille Hadzihalilovic, Marina de Van, Aurélia Mengin, Léa Mysius, Agnès Merlet, Zoé Wittock et Joséphine Darcy-Hopkins.

L'AVIS :

Deux ans après "La nouvelle vague du cinéma de genre en France", un nouveau tome nous provient de chez Jaguarundi Editions, sous la supervision de l’auteur-scénariste-réalisateur Julien Richard-Thomson ayant lui-même œuvré sur ce nouveau livre intitulé "Le cinéma de genre au féminin".
Accompagné de Marine Bohin, journaliste cinéma (So Film) et comédienne, et de Noémie Luciani, journaliste cinéma également (Le Monde, La Septième Obsession), notre homme va cette fois-ci s’intéresser plus particulièrement aux artisanes du cinéma de genre francophone.

Pas de Xavier Gens, Pascal Laugier, Alexandre Aja, Julien Maury, Alexandre Bustillo et autres Mathieu Turi et Fabrice Du Welz : exit les hommes et place à la gente féminine qui a bien des choses à nous raconter elle aussi !

Bien évidemment, n’ayant pas œuvré sur ce nouveau tome de la collection comme ce fut le cas pour le second (qui compte aujourd’hui trois ouvrages), cette critique purement subjective comme d’habitude est faite par un critique non orienté et non influencé comme certain(e)s pourraient le penser aux premiers abords.
Julien Richard-Thomson est certes devenu un bon camarade et Aurélia Mengin (qui participe à ce projet) une très bonne amie à l’équipe d’horreur.com mais je n’hésiterais pas à dévoiler quelques points perfectibles s’il le fallait.

Deux ans après donc, on retrouve la même formule qui marche : mettre entre nos mains un livre en format 15x21cm avec une sympathique introduction sur la thématique annoncée par le titre suivie d’un beau petit lot d’interviews.

L’introduction se décompose en deux parties. Tout d’abord une préface signée Noémie Luciani qui nous arrive sur ce livre très inspirée, nous offrant un texte très stylé dans lequel elle va, le temps de 6 pages environ, nous parler des cinéastes qui vont participer aux interviews qui constituent la seconde partie (et la plus conséquente) de l’ouvrage ainsi que de leurs œuvres phares.

Puis vient la traditionnelle introduction intitulée ici « Les femmes à la conquête du genre ». Ecrite par Julien Richard-Thomson, cette sympathique partie est certes plus courte que celle du livre "La nouvelle vague du cinéma de genre en France" mais pas moins intéressante. Entre le mouvement MeToo qui a ébranlé le monde du cinéma, de la littérature ou encore de la télévision, et les problèmes de parité homme/femme dans divers milieux (et notamment la culture) qui ont fait (et font toujours) l’objet de discussions autour d’une table sur les plateaux télé mais également au sein du Gouvernement, Julien Richard-Thomson nous donne son avis sur le cinéma de genre au féminin. Alors que le cinéma de genre est déjà loin d’être le cinéma le plus représenté par chez nous (le cinéma d’action et la comédie, voire même les drames et thrillers, ont bien plus la cote sur le territoire français), être en plus une femme derrière la caméra ne semble pas aider pour trouver des financements ou encore des producteurs et des distributeurs (quelques cinéastes donneront un peu plus tard dans la seconde partie du livre notamment des tentatives d’explications à cela ou du moins tout simplement leur façon de voir la chose).
Tout comme Noémie Luciani, notre cinéaste-auteur revient sur chacune des réalisatrices qui figureront dans les interviews du livre mais va s’interroger notamment sur le terme « female gaze » qui sera l’un des fils conducteurs de "Le cinéma de genre au féminin" et posera une question très intéressante : un film de genre réalisé par une femme sera-t-il fondamentalement différent d’un film réalisé par un homme ? Autrement dit existe-t-il une manière féminine de tourner du cinéma fantastique, de science-fiction ou d’horreur ? Lors des interviews, dans lesquelles notamment des réalisatrices reviendront sur des anecdotes de tournages et sur des difficultés rencontrées en préproduction-tournage-postproduction, plusieurs éléments de réponses seront donnés à ces questions de Julien Richard-Thomson.

Des talents féminins, nous en avons et c’est indéniable. Et si ces dernières apportaient quelque chose de nouveau dans cette nouvelle vague du cinéma de genre que nous vivons depuis quelques temps en France et de manière plus générale dans l’espace francophone ?

A l’inverse de son prédécesseur qui laissait parler (et sortir quelque peu de l’ombre) volontairement certains cinéastes moins connus (pas de Pascal Laugier, Alexandre Aja ou encore Xavier Gens mais uniquement quelques citations et allusions à ces derniers) pour nous les faire découvrir au fil des questions des journalistes/critiques de cinéma, "Le cinéma de genre au féminin" va ici faire appel au gratin des cinéastes féminines du moment dans le milieu francophone.

Comment parler de réalisatrices de cinéma de genre en francophonie sans parler notamment de Marina de Van et d’Aurélia Mengin, les deux « têtes d’affiche » - si l’on peut dire ainsi – du livre ? La première nous avait notamment offert dans les années 2000 les mémorables "Dans ma peau" et "Ne te retourne pas" tandis que la seconde, grande amie d’horreur.com, est une personnalité multi-facette à la fois réalisatrice/actrice (8 courts métrages et 2 films à ce jour : "Fornacis" et "Scarlet blue") et fondatrice/organisatrice du Festival International du Cinéma Fantastique « Même Pas Peur » ayant élu domicile il y a plus de 10 ans maintenant sur l’île de La Réunion.

Certes un peu moins connues mais faisant quant à elles parties des pionnières du cinéma de genre au féminin dans l’espace francophone avec des premiers films tournés dans les années 90, nous retrouvons avec grand plaisir Lucille Hadzihalilovic (à qui l’on doit entre autres "Innocence" et surtout "Evolution" dont je vous avais parlé avec beaucoup de bien en sortie d’une projection au Festival de Gérardmer d’où il était reparti avec le Prix du Jury et le Prix de la Critique) et Agnès Merlet ("Dorothy", "The last son"…). Deux personnalités assez discrètes mais aux filmographies loin d’être négligeables dans le paysage fantastique assurément !

Et comment parler de cinéma de genre au féminin sans inviter à table Coralie Fargeat, la réalisatrice du très médiatisé "Revenge" que nous avions beaucoup aimé à horreur.com et qui avait été primé au grand Festival de cinéma de genre de Busan en Asie.

Enfin, trois autres réalisatrices peut-être moins connues des lecteurs mais aux parcours là aussi fort intéressants viennent se joindre aux cinq précédentes : Léa Mysius (dont le film "Les cinq diables" s’offre la couverture du livre, un long-métrage que je n’ai pas encore vu mais qui m’intrigue fortement), Joséphine Darcy-Hopkins (dont je vous avais déjà parlé lors de nos échanges avec l’ami Rémy Barbe car tous deux font partie du collectif « Les Films de La Mouche », ayant réalisé notamment les courts métrages "Justines", "Margaux" et "Le jour où maman est devenue un monstre") et enfin Zoé Wittock qui nous avait fait une proposition de cinéma des plus originales ces dernières années dans le milieu du fantastique avec le très bon "Jumbo", véritable coup de cœur pour ma part lors de la 27ème édition du Festival de Gérardmer.

Pour celles et ceux ayant lu le livre "La nouvelle vague du cinéma de genre en France", vous remarquerez qu’Aurélia Mengin, Coralie Fargeat et Zoé Wittock s’étaient déjà prêtées au jeu des interviews. Cependant, rassurez-vous, cela ne fait nullement doublon car les thématiques sont différentes ici.

Bon, vous l’aurez également remarqué (nous n’allons pas le cacher ni tourner autour du pot bien longtemps, ce n’est pas le genre de la maison), une personne n’est pas présente sur ce livre (et ni sur le précédent d’ailleurs) : la réalisatrice des films "Grave" et "Titane". Julia Ducournau n’a en effet pas souhaité répondre une fois de plus aux questions des auteurs. Bien qu’aimant beaucoup les deux films précédemment cités comme en témoignent mes critiques sur le site, j’ai par contre un peu plus de mal avec la personne derrière la caméra qui reste muette à nos propositions d’interviews depuis si longtemps (sauf si tu t’appelles Mad Movies ou L’Ecran Fantastique, vous avez bien de la chance les copains !).

Bonne surprise, ce chapitre des interviews, partie la plus importante du livre (120 pages environ) rappelons-le, a pallié à l’un des petits points faibles de son prédécesseur : en effet, alors que ce dernier pouvait parfois paraitre redondant sur certaines questions posées aux cinéastes, ici les interviews suivent certes un fil conducteur (parler du cinéma de genre au féminin bien évidemment) mais les questions posées sont plus orientées vers l’interlocuteur et sont moins nombreuses à être d’ordre général (il y en a forcément pour avoir l’avis de chaque personne mais elles sont peut-être moins nombreuses).

Ainsi, nous en apprenons beaucoup sur leurs premiers pas dans le cinéma, leurs sources d’inspiration (leurs films fétiches, les réalisateurs/trices dont elles aiment la filmographie…), les réalisations de certains de leurs films (les difficultés rencontrées, les choix opérés sur les castings ou les lieux de tournage... le tout parsemé de sympathiques anecdotes) ou encore les accueils reçus pour quelques-uns de leurs métrages.

Et bien évidemment, plusieurs questions sont orientées pour discuter de leur perception du cinéma de genre actuel et de la place des femmes dans ce milieu déjà assez restrictif de base. Discutons budget alloué ou encore difficultés à trouver des financeurs, des producteurs et des distributeurs mais également de choses qui fâchent comme certaines déceptions, désillusions voire frustrations dans la carrière de certaines ayant subi de vrais obstacles pénalisants et des semi-échecs.

Un vrai plaisir de pénétrer le temps de quelques pages dans l’univers de chacune de ces talentueuses artisanes du cinéma de genre ! Pour ma part, en termes de contenu j’ai tout particulièrement apprécié les interviews de Coralie Fargeat, Aurélia Mengin et surtout Zoé Wittock mais cela reste purement subjectif et toutes ont bien entendu un réel intérêt.

Au final, nous avons là un sympathique ouvrage une fois de plus sortant de la maison Jaguarundi, riche en anecdotes de tournage et écrit avec beaucoup de passion. L’occasion d’en savoir un peu plus sur ces artisanes du cinéma de genre mais également sur certaines qui, malgré un talent indiscutable, vivent loin de la lumière des projecteurs et de la plume des journalistes.
Nous pourrons regretter, outre quelques fautes d’orthographe ou de syntaxe par-ci par-là, à nouveau peut-être un manque de visuel (ça manque un peu de photos, de captures de films ou encore d’affiches), et peut-être aussi en annexe une liste non exhaustive de films francophones réalisés par des femmes autres que ceux des cinéastes interviewées ici (dans le précédent livre "La nouvelle vague du cinéma de genre en France", j’avais insisté pour avoir cet annexe que je jugeais important à mes yeux pour les lecteurs).
Mais ne boudons pas notre plaisir : ce nouveau tome a vraiment de la gueule (tout comme le précédent ouvrage, la couverture est fort jolie et le format bien adapté), traite d’un phénomène vraiment intéressant et compte au sein de ses collaboratrices que des belles figures de notre cinéma francophone !

D’autres ouvrages de cette collection sont attendus d’après Julien Richard-Thomson, on patiente donc et on sera là bien évidemment pour vous en parler !

Note
4
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David Maurice