Expérience - L'
Das Experiment
The experiment
Afin d'étudier scientifiquement le comportement humain, le professeur Thon enferme vingt volontaires, des hommes ordinaires, dans un univers carcéral. Huit d'entre eux sont désignés pour être les "gardiens", les douze autres étant les "prisonniers". La règle est simple : comme dans une vraie prison, les détenus doivent obéir aux gardiens qui sont chargés de faire régner l'ordre.
Inspiré du roman Black Box, de Mario Giordano, s’appuyant lui-même sur l’expérience de Stanford, dans laquelle des étudiants avaient pris le rôle de prisonniers et de gardiens, Das Experiment est un thriller allemand réalisé par Oliver Hirschbiegel, à qui l’on devra quelques années plus tard "La Chute". Il met donc en images une expérience bien particulière, destinée à observer le comportement d’individus placés dans le rôle de l’autorité ou soumis à cette autorité. Une étude qui, évidemment, va rapidement déraper.
Tout commence pourtant dans la bonne humeur, les gardiens et les prisonniers plaisantent, ne sont pas encore dans leur rôle. Mais très vite, notamment face au comportement de Tarek, prisonnier qui est en fait un journaliste infiltré à la recherche de sensationnel, l’autorité se fait plus présente, plus stricte...jusqu’à ce que certains gardiens ne prennent leur rôle un peu trop à coeur. C’est le cas de Berus, que l’on devine très réservé dans son quotidien, mais qui va voir dans son rôle de gardien l’occasion de se mettre en avant, utilisant l’humiliation comme principale arme pour contrôler les détenus.
Cette évolution va se traduire par des comportements de plus en plus abusifs envers les prisonniers, d’abord en les obligeant à dormir par terre, à se mettre nus, à être humiliés devant leurs camarades, puis en utilisant la violence physique. Tous les moyens sont bons pour mettre les faux détenus au pas, ces derniers étant alors condamnés à une soumission totale ou, pour Tarek, le leader du groupe, à des punitions toujours plus sévères. Ainsi, le film bascule peu à peu dans le cauchemar, dans la violence, et va réserver quelques moments nous mettant particulièrement mal à l’aise. On est ainsi scandalisés par certains traitements réservés aux faux détenus (la boîte noire est une véritable horreur), on est horrifiés par le comportement des meneurs du groupe des gardiens...tout en ayant de véritables réserves sur celui de Tarek, toujours apte à foutre le bordel, quitte à entraîner l’humiliation de tout son groupe, uniquement pour obtenir un scoop...
Pour renforcer le réalisme de ces situations, le réalisateur avait auditionné les acteurs en groupe, afin d’observer la place que chacun prenait naturellement, et modifiant ainsi certains rôles : Christian Berkel ("Black book", "Walkyrie", "Inglourious basterds"), s’est ainsi retrouvé détenu alors qu’il devait au départ jouer le rôle d’un gardien. Hirschbiegel a ensuite laissé place à l'improvisation, et enfermait réellement les prisonniers dans les cellules pendant le tournage. Il favorisait également certaines amitiés ou antipathies entre les acteurs, parvenant à créer deux groupes distincts sur le tournage, prenant même leurs repas séparément !
Le film est par ailleurs largement soutenu par les acteurs interprétant les rôles des leaders de chaque camp : Moritz Bleibtreu ("Munich") dans le rôle de Tarek, le jeune journaliste d’origine turque, et Justus von Dohnányi ("La Chute") dans celui de Berus, le gardien le plus sadique. Si leurs apparences respectives permettent d’évoquer le racisme, c’est surtout dans les comportements du groupe des gardiens que l’on retrouvera le parallèle le plus évident avec l’univers concentrationnaire.
A l’image de "La Vague", Das Experiment est un film allemand très dur et particulièrement pessimiste quant à la nature humaine, comme un rappel que les dérives totalitaires ne sont jamais bien loin. Cela donne à cette oeuvre une puissance encore plus forte, renforçant davantage l’aspect horrifique et glauque de l’histoire et des images.