L'etrange festival : compte-rendu

L'etrange festival : compte-rendu

Bien que L'ETRANGE FESTIVAL ne soit pas encore terminé, notre rédacteur Sylvain vous fait un compte-rendu de ce qu'il a pu voir durant ces quelques jours passés dans les salles de ce festival hors-norme...

Comme chaque année, a lieu au forum des Halles à Paris, le célèbre « Etrange Festival » qui en est aujourd’hui à sa XXIème édition, ce qui ne nous rajeunit pas, convenons-en. Sur ces dix jours de festival qui s’étalent du 3 au 13 septembre 2015, plus de 80 films sont projetés et cela sans compter tous les courts métrages inclus lors des compétitions courts ! Bref, difficile d’être partout et il a fallut que je jongle avec mon emploi du temps et avec les salles pour réussir à en voir le plus possible pendant mes jours sur place et aussi, il faut bien l’avouer, choisir les films qui me donnaient le plus envie même si, avec regret, j’ai du en laisser certains sur le carreau.

Encore une fois, la sélection était variée autant dans les genres que dans les origines des films mais surtout de qualité. En tous cas, de par les films que j’ai eu la chance de voir, la majeure partie était bons, certains étaient même très bons et au minimum divertissant. Seul un ou deux métrages m’ont clairement ennuyé mais, j’ai envie de dire, voyons ça avec un petit résumé/avis sur chaque film visionné, en attendant les chroniques plus détaillées !

Les films sont classés dans l’ordre de visionnage :

1. « Love & Peace » de Sono Sion
Lorsqu’on entre dans la salle pour voir un film de Sono Sion, on est à la fois confiant car le réalisateur japonais arrive toujours à nous impressionner et à la fois, un peu craintif car, on se dit qu’à force de coups de maître, il va peut être finir par perdre son « mojo » surtout vu la vitesse à laquelle il tourne ses films actuellement (Takashi Miike sort de ce corps !). Bonne nouvelle, ce n’est pas encore pour « Love & Peace » que Sion-San va nous décevoir, loin de là ! Et pourtant, le réalisateur joue dans un registre un peu casse-gueule puisqu’à travers le périple de Ryoichi, jeune homme timide et mal-aimé rêvant de devenir une rock-star, et de sa tortue, Sono Sion nous livre un film « enfantin », sans violence aucune mais totalement brillant. Ce drame accessible à toute la famille émerveillera les petits et rendra leur âme d’enfants même aux adultes les plus coincés. Drôle et émouvant, « Love & Peace » est une pépite que je vous conseille de voir d’urgence pour toutes ses idées incroyables et surtout pour Pikadon, la petite tortue devenue kaiju.

2. « Another » de Jason Bognacki
En sortant de « Love & Peace », j’avais la possibilité d’aller voir le deuxième film de Sono Sion diffusé lors de ce festival : « Tag ». L’envie était grande mais j’ai préféré me laisser porter vers la salle 100 afin d’y voir « Another », un film au résumé intriguant et, en plus, interdit aux moins de 16 ans ! ça allait me bousculer un peu et me sortir du doux et merveilleux état de rêverie dans lequel m’avait mis « Love & Peace ». Finalement, au lieu de me faire bousculer, je me suis fait assommer par cet « Another » certes joli mais d’un ennui mortel et à l’intrigue incompréhensible. 78 minutes de métrage qui paraissaient une éternité… Un naufrage dans lequel les séquences s’enchaînent à coup de fondu au noir sans lien concret. Cette histoire laborieuse de recherche maternelle et n’arrive même pas (ou à peine) à être sauvé par son adorable actrice principale : Paulie Rojas.

3. « La peau de Bax » d’Alex Van Warmerdam
Un tueur à gage reçoit, le jour de son anniversaire, un contrat : tuer un écrivain isolé dans un chalet dans les marais. Partant de ce pitch, ma foie classique, le réalisateur hollandais Alex Van Warmerdam arrive à en tirer une comédie noire à la manière des frères Coen. On n’est pas encore dans la perfection d’un « Fargo » mais on se rapproche du style à travers ses personnages un peu losers et ses quiproquos incongrus. On a aussi parfois l’impression d’assister à une version marécageuse du vaudeville avec son comique de situations et ses entrecroisements de personnages. Au final, un bon moment de cinoche, drôle et efficace mais qui manque un chouïa d’originalité.

4. « Stung » de Benni Diez
Pour les deux prochains films, on virevolte vers la comédie horrifique avec, d’abord, « Stung », puis à la séance suivante, « Cooties ». Nous verrons ce dernier dans le paragraphe suivant et concentrons-nous sur « Stung » et ses guêpes agressives et géantes. Et bien, l’attrait principal du film vient justement de ses fameux insectes volants puisqu’ils ont vraiment de la gueule à l’écran. Les versions physiques des guêpes sont vraiment géniales, les CGI un peu moins mais ça passe et chaque apparition de ces grosses bêbêtes (et il y a en un paquet) fait son petit effet. Pour le reste, c’est du scénar’ classique : une fête, des invités, un massacre (d’ailleurs, on pourrait mettre n’importe quel type de menace sur la base du film) mais c’est plutôt fun et porté par un quatuor d’acteurs convaincants, dont ce vieux briscard de Lance Henriksen, qui surnagent au dessus des autres acteurs juste là pour être de la chair à canon, enfin à dard...

5. « Cooties » de Jonathan Milott et Cary Murnion
Après le sympathique « Stung », on reste donc dans le même type de films mais on passe un cran au dessus avec « Cooties » qui a l’avantage, si on veut toujours le comparer à « Stung », d’offrir une symbiose et des liens parfaits entre chaque personnage, ce qui manquait cruellement au film de Benni Diez. Ici, la mécanique est parfaitement huilée et chaque dialogue, en plus d’être souvent imprévisible, fait mouche. Hilarant, « Cooties » l’est clairement. Violent, il l’est aussi et cet espèce d’Armée des morts version cour de récré est tout simplement jouissif tant adultes qu’enfants s’en prennent plein la tronche à travers des effets gores efficaces. Ce film qui nous narre la contamination d’une école par un virus zombie contenu dans des nuggets de poulets (« Poultrygeist », je te vois) est donc une excellente surprise.

6. « L’élan » d’Etienne Labroue
A cet horaire, j’avais le choix entre voir « Yakuza Apocalypse », le nouveau film de Takashi Miike que j’avais très envie de visionner ou me rendre à la diffusion de « L’élan », un film français au pitch fou : « Une jeune fille rencontre par hasard un élan géant en peluche qui semble être un extra-terrestre. Très vite, l’étrange animal intègre la famille. Au même moment, Bernard Montiel arrive dans ce même village et est victime d’un accident de voiture ». Trop intrigué par cette histoire improbable, j’ai donc délaissé les yakusas vampires pour me rendre à la première mondiale (et même universelle) de « L’élan ». Un choix pareil m’avait valu quelques regrets, la veille, lorsque j’avais choisi « Another » au lieu de « Tag » mais c’est aussi ça, l’aventure ! Faut prendre des risques ! Et bien, mon courage cinéphilique a été récompensé puisque j’ai passé un très bon moment de ce film qui répond à toutes les questions que vous ne vous êtes jamais posés. Doté d’un humour burlesque irrésistible et d’un casting aux petits oignons, le film d’Etienne Labroue est à la fois drôle et poétique, délirant et captivant. Un film étrange et improbable mais qui emmène le spectateur avec lui et ne le laisse pas au bord de la route. Chouette découverte.

7. « The corpse of Anna Fritz » d’Hector Hernandez Vicens
On descend un peu au sud, chez nos amis ibériques et plus particulièrement espagnols avec « The corpse of Anna Fritz » qui nous conte la sombre histoire de trois copains de beuveries, dont un travail à la morgue, qui sous l’effet de drogues (et aussi parce que ce sont des pauvres cons) violent le cadavre d’une célèbre star de cinéma : la susnommé Anna Fritz. Se jouant quasiment intégralement dans la salle mortuaire, le film maintient le spectateur en haleine pendant toute sa courte durée (76 minutes) grâce à des retournements de situation qui tombent à intervalle régulier. Un sens du rythme bienvenu, un montage efficace et des dialogues ciselés permettent au film de laisser une belle impression quand arrive le générique final et ce même si sa seconde partie, qui rentre dans des chemins plus balisés, n’atteint pas la réussite de sa glaciale mise en place.

8. Ninja Eliminator 4 : The French Connection de Mathieu Berthon
Avant le lancement de ce court-métrage de 8 minutes, l’équipe du film est venu nous expliquer la genèse du projet à savoir que les trois premiers « Ninja Eliminator » sont des courts québécois et que pour le troisième volet, Mathieu Berthon avait tourné des séquences, sur la demande du réalisateur québécois François Simard, membre du collectif RKKS, lui donnant envie ensuite de faire un quatrième volet que voilà. Si ce paragraphe est un peu approximatif, c’est parce que c’était aussi le cas lors de la soirée ! Mais on s’est compris et je me comprends et c’est ça qui compte. Bref, « Ninja Eliminator 4 » est une fausse bande annonce d’un film de ninja (forcément) dans lequel un policier français décide de lutter contre le réseau de ninja local et d’apprendre les techniques ninjitsu ancestrales pour venger son partenaire décédé. Tourné avec pas grand-chose, « NE4 :TFC » est la preuve qu’avec des idées, du talent et beaucoup de folie, on peut arriver à offrir un spectacle aussi drôle et efficace qu’un gros budget (voir même plus). Le côté fauché rend justement la chose encore plus attachante surtout que le court-métrage fourmille d’idées et d’effets spéciaux bien branlés. Sans oublier, les superbes perruques et costumes des comédiens dont David Doukhan et Rurik Sallé.

9. Turbo Kid de RKKS Collective
« Turbo Kid » réalisé par le collectif RKKS, déjà responsable des premiers « Ninja Eliminator », est une petite bombe, tout simplement. Porté par un duo de jeunes comédiens époustouflants, le film raconte l’histoire d’un jeune orphelin, fan de comics book, qui survit dans un futur apocalyptique. L’originalité vient du fait que ce futur est en fait l’an 1997 et que le film est réalisé comme s’il avait été tourné dans les années 80 ce qui inclut les accessoires, la vision du futur ainsi que les gimmicks de l’époque. Un moment de cinéma jubilatoire à la fois drôle et méchamment gore dans lequel une pléiade de personnages singuliers s’unissent ou s’affrontent. On retrouve l’excellent Michael Ironside en méchant cabotin nommé Zeus qui tente d’anéantir notre fameux kid et sa petite amie Apple ainsi qu’un cowboy (mélange d’Indiana Jones et du pistolero de « La tour sombre » de Stephen King) champion du bras de fer. Entre trouvailles visuelles, rythme effréné et nostalgie, « Turbo Kid » laisse le spectateur avec un sourire béat à la fin de la séance.

10. Bunny the Killer Thing de Joonas Makkonen
Retour à la comédie horrifique mais cette fois en provenance de Finlande avec ce « Bunny the Killer Thing » dans lequel un lapin géant doté d’un pénis à faire pâlir Ron Jérémy et Rocco réunis cherche à trucider un maximum de donzelles mais aussi de mecs, finalement. Ça stagne au dessous de la ceinture tout du long et ça ne décolle vraiment jamais faute à un postulat cool mais qui ne tient pas sur la durée d’un long métrage. Divertissant malgré tout et dotés de quelques pistes intéressantes (les perversions des uns et des autres) ainsi que de quelques mises à morts sympathiques, « Bunny » pâtit d’une caractérisation moyenne de ses personnages (on ne s’attache à aucun d’entre eux), de longueurs plombantes et d’un humour pas toujours efficace. Un film qui se laisse regarder sans déplaisir mais qui ne tient pas les promesses que le pitch de base laissait augurer.

11. Tales of Halloween de Neil Marshall, Lucky McKee, Darren Lynn Bousman…
Film à sketches (une dizaine) sur le thème de la nuit d’halloween, “Tales of Halloween” n’a semble t’il pas convaincu une bonne partie du public (en tous cas, ceux avec qui j’ai discuté après la séance) et pourtant, il fait parti de mes chouchous notamment grâce à une photographie et une iconographie réussies rappelant aux bonnes heures de l’excellent « Trick R’ Treat » de Michael Dougherty. Les histoires quand à elles sont, comme dans quasiment tous les films à sketches, souvent inégales mais malgré tout dans une moyenne haute surtout qu’il se trouve qu’elles sont assez variées. De la légende d’halloween glauque, à l’histoire de fantôme en passant par le délire gore et l’hommage (en partie) à Vendredi 13, « Tales of Halloween » multiplie les effusions de sang, les gags sadiques et les climax glaçants pour le grand plaisir des fans du genre. Un des meilleurs films à sketches que j’ai vu depuis un bon bout de temps. A se mater tranquillement le soir d’Halloween avec des copains et un peu de bières.

12. WYRMWOOD : ROAD OF THE DEAD de Kiah Roache-Turner
Avant tout, je dois vous avouer que je me suis endormi une vingtaine de minutes avant la fin de ce film. Vous m’excuserez (ou pas) mais le film a débuté à 6 heures du matin après une longue nuit/journée. En tous cas, de ce que j’ai vu et de ce que je me rappelle, ce film ne m’a pas paru déplaisant. Pour résumé, cela se passe dans un monde post-apocalyptique infesté de zombies dans lequel un père de famille tente de survivre épaulé (ou pas) par des compagnons de route. A savoir, qu’en règle général, en étant en grande forme, je m’endors au bout de dix minutes devant un épisode de « The Walking Dead » donc avoir tenu plus d’une heure devant celui-ci est preuve d’une certaine réussite ! En tous cas, il est clair que niveau rythme, le film assure le coup puisque ça massacre du zombie sans cesse et de façon plutôt cradingue. Niveau scénario, rien d’original du tout mais la mise en scène hyper nerveuse et les maquillages réussis en font, semble t’il (si je peux me permettre d’en juger sans avoir vu tout le film et étant dans un état second le reste du temps de la projo), une péloche pas déshonorante et même, soyons fous, recommandable.

Sylvain

Stéphane Erbisti