Affiche française
TRIANGLE | TRIANGLE | 2009
Affiche originale
TRIANGLE | TRIANGLE | 2009
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Triangle

Triangle

Les passagers d'un bateau chavirent et rejoignent un mystérieux navire abandonné. Mais, à bord de celui-ci, la mort les attend….

TRIANGLE | TRIANGLE | 2009

Il y a des films dont il est indéniablement difficile de parler sans en révéler les ressorts de l'intrigue. Le scénario de Christopher Smith réussit l'exploit d'être à la fois très simple (il pourrait tenir sur un ticket de métro) et complexe dans sa structure, risquant d'en dérouter plus d'un. Car ici, il n'est pas question d'un film linéaire ni classique. Ne vous attendez pas à une énième version du bateau hanté style "Le vaisseau de l'angoisse" car le réalisateur anglais ne suit pas les chemins balisés du film d'épouvante classique, lui préférant une approche plus psychologique et aussi éthérée. Le film navigue ainsi entre la réalité et ce qui est de l'ordre du rêve et du fantasme. En refusant de nous donner les clés de ce qu’il se passe sur le bateau, Christopher Smith nous laisse dans l'interrogation la plus totale. Un parti pris culotté qui aurait très bien pu échouer entre les mains d'un autre réalisateur, mais aboutit ici à distiller une angoisse sourde et inquiétante, qui fait que l'on s'accroche à cette histoire en forme de boucle, et où le final rejoint une introduction, toute aussi mystérieuse…

Après "Creep" et "Severance", Christopher Smith démontre qu'il est un véritable créateur dans l'univers du fantastique, refusant de refaire ad vitam eternam le même film. A ce titre "Triangle" s'éloigne des sentiers gore de ses précédents films. Une chose qui ne change pas dans son univers, c'est en revanche le choix qu'il porte sur des héroïnes. Après Franka Potente et Laura Harris, c'est au tour de Melissa George de plonger dans l'univers du réalisateur. D'habitude habituée à côtoyer des vedettes masculines (Ryan Reynolds dans "Amityville 2005", ou Josh Hartnett dans "30 jours de nuit"), l'actrice porte le film sur ses épaules. Démontrant par la même occasion qu'elle est capable de jouer des personnages complexes !

En s'appuyant sur le mythe de Sisyphe, cité par les protagonistes, le réalisateur nous offre une grille de lecture pour appréhender ce qui va suivre. Fils du dieu du vent Eole (nom que porte le bateau entièrement déserté), Sisyphe a été condamné à rouler éternellement un rocher. Ce qui nous donne une piste de réflexion que n'ont pas les naufragés, à l'exception du personnage de Jess, qui a comme des impressions de connaître les lieux (la fameuse impression de déjà-vu). C'est bien au travers le regard de ce personnage toujours un peu en état d'hébétude que nous assistons à un spectacle de poupées russes, qui semble ne jamais se terminer. Pas du tout passive, Jess, jeune mère de famille d'un enfant autiste, tente de retrouver la maîtrise de son destin qui semble lui filer entre les mains.

En refusant de donner une explication claire aux événements, Christopher Smith laisse la porte ouverte à toutes les interprétations. Son recours à une luminosité omniprésente peut de prime abord nous faire douter quant à sa capacité à générer de l'angoisse. C'est certainement là que le réalisateur réussit le plus son pari car malgré l'aspect répétitif de nombreuses scènes, il réussit à créer un climat de perplexité et d'angoisse, tout en évitant de jouer sur les fameux jump scares.

Tout en s'inspirant du mythe du triangle des Bermudes- sans jamais citer ouvertement ce dernier- et des vaisseaux fantômes, "Triangle" en fait une approche plus nébuleuse qu'à l'accoutumée, un peu comme si David Lynch avait participé à ce projet. Certes, le métrage est plus abordable qu'un "Lost Highway" ou encore d'un "Mulholland Drive" mais en refusant d'être un nouveau film d'épouvante lambda, le réalisateur ne joue pas la carte de la facilité. Passé les vingt premières minutes jusqu'au naufrage (époustouflante scène de tempête), le spectateur se trouve en terrain connu, puis on bascule dans une autre dimension. D'ailleurs, "Triangle" aurait très bien pu constituer un épisode de "La quatrième dimension".

La durée du long-métrage peut provoquer un sentiment de lassitude et il n'est pas certain que cette histoire plaise à un large public venu chercher du frisson et des scènes gore, qui sont ici réduites à leur plus simple expression. Le réalisateur de "Creep" préférant pour une fois mettre l'accent sur la détresse psychologique de son héroïne.

Formellement réussi, "Triangle" bénéficie aussi d'une interprétation toute en demi teinte de Mélissa George (à la limite de la schizophrénie), dont les failles ne font que se s'agrandir au fur et à mesure que l'intrigue prend de l'ampleur. Christopher Smith nous montre par la même occasion une autre facette de son talent.

TRIANGLE | TRIANGLE | 2009
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Note
4
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Gérald Giacomini