Affiche française
EDEN LOG | EDEN LOG | 2007
Affiche originale
EDEN LOG | EDEN LOG | 2007
Un film de
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Eden log

Eden log

Un homme se réveille, nu, dans l'obscurité la plus totale, sur un sol que l'on imagine sale, froid et humide. Couvert de boue jusqu'à lui coller les cheveux sur le crâne, il va tenter, malgré son amnésie qui semble totale, de savoir où il est, qui il est et si possible de se sortir de ce bourbier.
Rapidement il va se rendre compte qu'il est prisonnier à l'intérieur d'un complexe mi-technologique, mi-végétal.
Son seul espoir et la seule solution qui lui reste, c'est de remonter vers la surface et tenter de comprendre.

EDEN LOG | EDEN LOG | 2007

Qu'il est difficile d'introduire un peu de différence dans le paysage cinématographique hexagonal!
Saboté par les distributeurs, méprisé par la " critique officielle", Eden Log a tout du métrage maudit.
Loin des oukases lancées ici ou là par des plénipotentiaires bien assis sur leurs certitudes, s'acharnant de manière ostensible et subjective( et pour ainsi dire de manière quasi-Pavlovienne ) sur le moindre film français osant s'aventurer dans le domaine de l'imaginaire, il convient de rendre justice aux qualités intrinsèques d'un métrage, qui loin d'être un chef d'oeuvre impérissable mérite au moins le respect.
Pourtant que l'on ne s'y trompe pas, nous avons ici droit à un véritable de SF (et non pas à un ersatz qui prend quelques thèmes récurrents et faciles pour se donner une caution scientifique, le plus souvent gonflé au CGI pour faire futuriste. Je n'aurais pas l'outrecuidance de vous en faire la liste, tant celle-ci est longue). Ici les thèmes abordés sont ceux d'une SF qui se veut (et c'est sa raison d'être première) intelligente, réflexive, voulant faire naître chez le spectateur un " vertige logique", en contant une histoire cohérente de bout en bout sans pour autant assener à toute force une explication, une morale ou une vision de son auteur (laissant donc le champ libre à l'interprétation de chacun) mais se refusant à botter en touche quand il s'agit de réfléchir à l'aspect du monde d'aujourd'hui.
Ce fragile équilibre est rarement trouvé au cinéma dans ce genre devenu hélas fourre-tout qu'est la science-fiction. Et le plus grand mérite du métrage se trouve ici. Il ne prend pas le spectateur pour un gueux inculte incapable de saisir les métaphores, non-dits, circonvolutions, réflexions des auteurs. Un film adulte en somme.

Sortant de la boue primordiale, le personnage incarné par Clovis Cornillac (qui semble s'être véritablement investi dans son rôle) se réveille. Le bien nommé Tolbiac, certainement en référence à la bataille du même nom, où les Francs et leur chef le roi Clovis massacrèrent les Alamans et dont la conséquence fut la conversion de celui-ci au culte catholique, devra tel un Adam chassé du Paradis originel, s'habituer, comprendre, investir ce nouveau monde où les pièges, énigmes et monstres sont nombreux, il y trouvera même son Eve à l'intérieur de l'arbre (de la connaissance ?) et la rédemption au bout du chemin ?
A cette vision métaphysique qui constitue la toile de fond du métrage, Vestiel et son co-scénariste l'écrivain Pierre Bordage (adepte des cycles d'héroic-fantasy que l'on peut qualifier d'humaniste, à défaut d'être franchement prenant) y mêlent allégrement plusieurs pans et sous-genre de la SF, en y ajoutant une pincée de fantastique calibrée et intégrant l'univers du jeux vidéo.
Tendance "cyberpunk" avec une humanité semblant au bord du gouffre suite à l'invention d'une toute nouvelle source d'énergie, aspiration "post-apocalyptique" au travers de problèmes écologiques que sous-tend l'intrigue, inclination "steampunk" par des décors futuristes évoquant tout à la fois "Brazil" et "Tetsuo", propension à la "fiction spéculative" en invoquant les soucis éthiques, morales et sociales de la mise en coupe réglée de la nature par l'homme, "dystopie"( s'opposant à l'utopie) d'un monde où l'être humain n'est plus qu'une variable économique, "Anticipation" pour un meilleur des mondes effrayant et scientiste.

Si l'on peut craindre le pire au vu de vingt premières minutes perdues dans l'obscurité et la maîtrise technique un peu vaine, le reste est d'un tout autre acabit et l'on est rapidement conquis par la quête de Tolbiac, architecte de sa propre décadence plongé dans une atmosphère singulière et immersive rendue crédible par une photographie à la beauté saisissante, où le silence angoissant entre en résonance avec un peuple d'ouvriers mutants.
La bande son réussissant à renforcer l'étrangeté, le futurisme décadent et la claustrophobie des lieux.
Franck Vestiel a voulu en dire beaucoup et en faire encore plus, et c'est là où le bas blesse de manière quasi-inévitable. En ne voulant jamais mettre en avant une idée, un concept plutôt qu'un autre, il se fourvoie parfois dans un trop-plein faisant perdre le fil à son auditoire. Le réalisateur n'arrive pas toujours à rendre intelligible la progression de l'intrigue s'appuyant sur le principe du niveau propre au jeu vidéo où la résolution d'énigme fait avancer le joueur, la faute à un montage parfois suspect ( et à cette nouvelle mode de la "caméra parkinsonienne" lors des scènes d'attaque)
Mais le gros point noir se trouve dans l'interprétation et la direction d'acteurs. En dehors d'un Clovis Cornillac qui fait le métier, les autres ne sont que rarement dans le ton, déjouant la plupart du temps. Si l'on ajoute à cela des dialogues qui frôlent parfois le ridicule, on est parfois pris de vertige devant l'incongruité que cela amène et qui font perdre de la crédibilité à l'ensemble.

Audacieux, inventif, cohérent de bout en bout, jusqu'au-boutiste par un final que certain jugeront peut-être naïf et gnangnan, mais qui en fait renvoi directement à une certaine vision pessimiste et anticipatrice de la SF du début des années 70 ( THX113, Soleil Vert, Phase IV...), faisant sens avec les grandes interrogations de notre présent ( économie, écologie, immigration, respect de l'être humain).

A voir si possible avec un appareillage technique de qualité ( à défaut d'avoir pu le voir en salle), pour en apprécier pleinement la substance.

Vestiel peut être fier de son bébé.

EDEN LOG | EDEN LOG | 2007
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Note
4
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Lionel Jacquet