Sermons de minuit
Midnight mass
Après avoir passé quatre ans en prison pour conduite en état d'ivresse, ce qui a coûté la vie à une jeune fille, Riley Flynn retourne à la maison familiale dans son île de Crockett Island. Sa mère, qui est très pieuse et qui lui a pardonné, l'attend au port. Lui-même a perdu sa foi durant son incarcération et a du mal à se réintégrer à la communauté catholique fervente de l'île. Son père, Ed, a du mal à l'accueillir et son jeune frère, Warren, passe son temps avec ses amis. Son arrivée est suivie du regard attentionné d'Erin, son amour de jeunesse devenue enseignante, depuis la fenêtre du cabinet du docteure Sarah Gunning, amie proche d'Erin, qui attend un enfant. Entre-temps, devant le ferry, Bev Keane, diacre bigote de l'église Saint-Patrick, attend le prêtre, monseigneur John Pruitt qui, suivant l'annonce du capitaine du navire, n'arrivera que dans l'après-midi. Plus tard, dans une classe d'école, se réunissent Erin, Bev, le maire Wade Scarborough, son épouse Dolly et le shérif musulman Hassan pour parler de la tempête qui se profile en mer. Le soir même, pendant que la tempête bat son plein, Riley semble voir une silhouette ressemblant à Pruitt depuis la fenêtre de sa chambre. Le lendemain matin, la famille Flynn sort de sa maison et Riley découvre, tout au long de la plage, des chats sans vie. Intrigué, le shérif fait évacuer les curieux de la plage ; le maire Wade lui précisant que ce n'est pas la première fois que cela arrive sur l'île. Tout le monde, surtout les chrétiens, se réunit dans l'église et sont surpris de l'apparition du nouveau prêtre : il se présente comme le père Paul Hill, remplaçant temporaire de John Pruitt qui serait malade et bloqué sur le continent jusqu'à son rétablissement. Riley, surtout, le trouve mystérieux. Peu de temps après l'arrivée du père Hill, des miracles se produisent...
L'AVIS :
Réalisateur des films "Oculus", "Pas un bruit", "Before I wake", "Ouija : les origines", "Jessie" ou "Docteur Sleep", Mike Flanagan s'est dirigé en 2018 vers la série-télévisée et ce, avec grand succès. Sa première réalisation dans ce domaine, "The Haunting of Hill House" s'est vu couronné d'un large succès public et critique. En 2020, il réalise "The Haunting of Bly Manor" et en 2021 cette excellente mini-série intitulée "Sermons de Minuit". Une mini-série de 7 épisodes d'une durée d'une heure et des poussières, qui se distingue de par son écriture, de par la qualité de ses dialogues, de sa mise en scène, de son interprétation et de la part de mystère et d'originalité qu'elle recèle.
Avec "Sermons de Minuit", Mike Flanagan va questionner les personnages de son histoire, ainsi que le public évidemment, sur la notion de Foi, plus particulièrement chrétienne. Les protagonistes de l'histoire sont multiples mais ont tous un rôle à jouer à un moment ou un autre. L'action du récit se déroule sur une petit île côtière, sur laquelle les habitants, principalement des pêcheurs, ont du mal à vivre de leur travail. La petite église de l'île se voit dépeupler de ses fidèles, surtout depuis que le vieux père Pruitt est parti sur le continent faire un pèlerinage à Damas. Les habitants vivent dans le doute, n'ont plus vraiment foi en Dieu. Le héros, Riley Flynn, fait son retour sur l'île après avoir purgé une peine de prison pour avoir tué une automobiliste alors qu'il était en état d'ébriété. Il retrouve ses parents, qui sont très pieux, et a du mal à communiqué avec son père. Il découvre qu'Erin Greene, son amoureuse d'adolescence, vit seule mais est enceinte. Parmi les autres protagonistes principaux, on citera bien sûr Bev Keane, superbement interprétée par Samantha Sloyan, une fidèle parmi les fidèles, qui connaît la Bible sur le bout des doigts et ne vit que pour l'amour de Dieu ; le docteur Srah Gunning, qui vit avec sa vielle mère atteinte d'Alzheimer ; le shérif Hassan, de confession musulmane qui vit avec son fils Ali et qui a été muté sur l'île ; Leeza, une jeune fille victime d'un tir raté et qui est désormais paraplégique et se déplace en fauteuil roulant. Et puis, il y a le père Paul.
Interprété avec une classe incroyable par l'acteur Hamish Linklater, il est le personnage emblématique de la série. Remplaçant le vieux père Pruitt, le père Paul va réussir à faire revivre la Foi chrétienne parmi les habitants de l'île. Et il parviendra même à faire des miracles, comme faire remarcher la jeune Leeza ! Le spectateur passe son temps à se questionner sur le père Paul, se demandant qui il est réellement ! Est-il vraiment prêtre ? Qu'a-t-il rapporté avec lui dans cette grande malle ? Est-il un usurpateur ayant pris la place du père Pruitt ? Un gourou qui va lobotomiser les esprits des habitants de l'île et faire de cette petite communauté une secte ? Comment a-t-il réussi à faire marcher Leeza ? Comment réussit-il à rendre la mémoire et la forme aux habitants qui viennent communier au sein de l’Église ? Autant de questions qui nous obsèdent et dont le réalisateur prend le temps de trois épisodes avant de nous donner des indices ou faire quelques révélations. Et quelles révélations ! Le tétanisant final de l'épisode 3 par exemple, avec tout le passage se déroulant à Damas en compagnie du père Pruitt, est d'une puissance incroyable et nous laisse pantois devant notre écran.
Sans trop en dévoiler ou révéler, sachez que le fantastique aura une part importante à jouer dans cette mini-série d'une qualité remarquable. Mais plus que cet élément, c'est bel et bien la qualité des dialogues et l'agencement du récit qui nous tient en haleine et fait qu'on reste les yeux rivés devant notre écran, désirant enchaîner les épisodes pour connaître la suite et les rouages de l'histoire. Je lis ci et là que les dialogues "seraient trop longs et ennuyeux". Comment peut-on dire ça ? A moins d'être biberonné uniquement à des films du style "Fast and Furious", il est assez déconcertant de lire ce type d'arguments, notamment chez les amateurs d'un cinéma fantastique de qualité. Car les dialogues sont ici d'une finesse rare, toujours intéressants et diablement bien écrits. Jamais ennuyeux, bien au contraire. Certes, ils sont tous axés sur la notion religieuse, ce qui pourraient à la rigueur en rebuter certains. Mais Mike Flanagan ne fait pas l'apologie de la religion chrétienne. Au contraire. Il met en garde contre le fanatisme religieux, contre les gourous qui réussissent à faire croire ce qu'ils veulent à une population en souffrance et qui cherche un réconfort. Des gourous qui peuvent être eux-mêmes victimes d'illusions et croire à quelque chose qui n'est pas la vérité uniquement par conviction religieuse. Plus les épisodes défilent, plus on sent que l'Apocalypse se rapproche et que tout va mal se terminer.
Les amateurs du genre verront dans "Sermons de Minuit" quelques analogies avec le superbe roman de Stephen King, Salem. Stephen King qui s'est lui-même pris d'affection pour la mini-série de Mike Flanagan d'ailleurs ! Honnêtement, j'ai été tenu en haleine durant les 7 épisodes, je n'ai jamais trouvé le temps long, j'ai été captivé par le fond et la forme et par les éléments fantastiques disséminés au sein du récit. Une mini-série que je recommande vivement.