Affiche française
DOLL SYNDROME | DOLL SYNDROME | 2014
Affiche originale
DOLL SYNDROME | DOLL SYNDROME | 2014
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oui

Doll syndrome

Doll syndrome

Si l'homme est vide avec sa coquille de viande et sang redondante, là où l'esprit n'est plus présent... cette coquille déshumanisée, est-elle capable de faire des choses terribles ?

DOLL SYNDROME | DOLL SYNDROME | 2014

Une question étrange faisant l'objet d'un synopsis pour ce surprenant "Doll Syndrome", un film quasi-inconnu du public livré par le réalisateur italien Domiziano Veldaux Cristopharo qui a été le premier à essayer de relancer le genre érotico-horrifique avec "House of flesh mannequins" avec une figure du cinéma d'exploitation italien, Giovanni Lombardo Radice ("Cannibal ferox", "Pulsions cannibales"...), un film déviant très proche du cinéma de Jess Franco.

Son style est souvent comparé à Frederico Fellini et Dario Argento, car il donne un rendu esthétiquement vintage très élaboré dans ses films. En revanche, certains définissent son cinéma de "pornographique", mais il ne leur donne qu'en retour une citation de Picasso: "L'art n'est pas chaste, on devrait l'interdire aux ignorants innocents. S'il est chaste, ce n'est pas de l'art".

Abordant les différentes étapes Dantesques, l'artiste inverse le parcours en commençant par le paradis ("Dark Waves"), le purgatoire ("Red Krokodil") avant de finir dans l'enfer avec "Doll Syndrome". Sa collaboration avec Poison Rouge et Adam Ford donnera naissance à la Trilogie de la Mort avec "Sacrifice" (le quatrième volet de American Guinea Pig), "Torment" et "Xpiation", une série de films qui risque de porter un coup brutal dans le cinéma extrême.

N'ayant pas encore découvert sa filmographie (comptant environ une dizaine de films), je peux au moins affirmer que ce "Doll Syndrome" est également une œuvre d'art avant d'être un film érotique explicite. Les individus facilement perturbés par quelques éjaculations (qui a valu l'interdiction aux moins de 18ans à "Love 3D" de Gaspar Noé...) n'y verront qu'un film pornographique alors que ça va plus loin que ça tant le drame psychologique omniprésent est puissant. Sans tomber dans l'homo-érotisme (comme peuvent le croire certains éditeurs étrangers refusant honteusement de distribuer ce film pour cette raison), il est étonnant de voir à quel point l'artiste italien arrive à sublimer le corps d'un homme avec des cadrages époustouflants et une image lisse et somptueuse à couper le souffle. Non seulement la direction artistique est irréprochable, mais cette atmosphère charnelle et presque onirique arrivera à mettre de côté l'excitation pour se pencher sur la beauté-même du corps de l'Homme.

Malheureusement plusieurs personnes sont difficilement réceptives et les réduisent à du cinéma homo-érotique. Ce qui est désolant, c'est que lorsqu'on remplace des seins par un pénis, le spectateur change de version et pose des avis faussés sur l'intérêt du film. Il ne remarque plus que l'attribut phallique et refuse de porter une quelconque attention sur la vraie qualité artistique du film afin de repartir à la recherche d'une nouvelle paire de boobs...

Etant 100% hétéro, je peux vous affirmer qu'on prend plus de plaisir visuel à voir la manière dont Domiziano Cristopharo filme le corps d'un homme nu plutôt que de voir la médiocrité de la pornographie hétéro d'un Andreas Bethmann qui n'a d'intérêt que son ridicule paroxystique.

Editeurs indépendants étrangers et francophones, réfléchissez et demandez-vous si vous visez la qualité ou le pouvoir marketing quand vous décidez de vous attaquer à la distribution de films underground...

Bref, revenons sur le film.
Démarrant donc sur le personnage principal (joué par Tiziano Cella) entièrement nu, ce dernier se positionne devant sa fenêtre, observant les mouvements de la rue et s'adonnant à une première masturbation engendrant un jet de semence sur la vitre. Le genre de scène qui peut s'avérer déstabilisante pour les non habitués... mais la douceur du montage, la netteté et la beauté des gros plans rendent ce genre de séquence récurrente facilement regardable et surtout appréciable.

On remarquera l'absence d'expression de l'homme suite à des événements post-traumatiques de l'armée laissant présager une situation anti-utopique et relativement inquiétante sur sa condition émotionnelle. Surtout lorsqu'on voit ce pauvre homme vomir plusieurs fois, s'uriner dessus, s'auto-mutiler, s'adonner une nouvelle fois au plaisir solitaire etc... L'homme ne devient plus qu'une poupée de chair et de sang piégée dans les méandres de ses traumatismes.

On comprend très vite que le film est également une histoire d'amour impossible portée sur le désespoir d'un malheureux quotidiennement illuminé par une jeune inconnue. Sa solitude constamment menée par l'incapacité d'aborder la moindre conversation le conduira dans l'absence de sentiment et de conscience envers sa propre existence.

Psychologiquement condamné à errer dans la solitude, chaque jour il finira par se retrouver chez lui en présence d'une poupée gonflable qu'il comparera à sa charmante dame dans sa copulation solitaire, une scène très réussite mise en parallèle avec des bruitages sonores qui représentent de vrais sons de jouissance féminine pour appuyer la symbolique évidente.

La poésie dramatique est omniprésente, autant qu'elle est intense. Domiziano Cristopharo taille un chef d’œuvre malgré quelques légers faux-raccords flagrants et réussit à inclure des scènes particulièrement trash penchées sur le vomissement, l'urine et les saignements dans un climat à la fois apaisant et dérangeant. Ce mélange des deux extrémités, rares sont ceux qui arrivent si bien à le perfectionner. Les musiques absolument magnifiques donnent à certaines séquences clipesques une remarquable classe qui appuie la descente aux Enfers de l'homme que l'on suit sans cesse dans le plongeon de son désespoir.

Emotionnellement renversant, on pourrait presque croire à un croisement entre le cinéma de Marian Dora et celui de Gaspar Noé. Domiziano provoque une puissante douleur dans nos cœurs à travers ce conte pessimiste réveillant les pulsions d'un individu désemparé.

Evidemment il faut se préparer à grincer des dents, car les séquences de la dernière partie du film sont d'une redoutable efficacité et nous embarquent dans un long moment de séquestration et de torture d'une perversité monumentale. La décadence de l'homme passe de la poésie à l'horreur pure, en enchaînant les images d'auto-mutilations de parties génitales dans une violence graphique épouvantable. Aussi écœurant que fascinant, rares sont les réalisateurs à aller aussi loin dans la torture perverse.

Un long-métrage inoubliable et digne de faire partie des incontournables du cinéma déviant moderne. Une œuvre insolite qui marquera les esprits et qui a le mérite que l'on y prête attention, ne serait-ce que par sa beauté érotico-dramatique et sa déviance repoussant les limites aussi loin que possible.

Espérons que le travail de Domiziano Cristopharo sera plus reconnu dans le milieu à l'avenir car cet artiste mérite de se classer parmi les plus grandes figures du cinéma extrême de ces dernières années.

DOLL SYNDROME | DOLL SYNDROME | 2014
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Bande-annonce
Note
5
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Nicolas Beaudeux