Opera

Opera

Lorsqu'une diva est mise sur la touche après avoir été renversée par une voiture, Betty la remplace au pied levé, pour jouer dans Macbeth, pièce réputée maudite. Ce qu'elle ignore alors, c'est qu'elle va devenir la cible d'un admirateur qui sème la mort autour d'elle. Un tueur lié à son passé, qui l'oblige à assister impuissante à ses crimes.

OPERA | OPERA | 1987

L'AVIS :

Avec "Opera", Argento peut livrer au monde entier son amour pour cet univers musical qu'il retrouvera plus tard avec son décrié "Le fantôme de l'opéra (1998)". La question qui se pose en visionnant ce giallo est de savoir s'il s'agit du dernier grand film du réalisateur italien ou bien du début de la descente aux enfers? Il y a un peu des deux dans le constat que l'on est obligé de faire après la vision de ce film qui fut difficile à aboutir.

Sorti directement en vidéo chez nous, "Terreur à l'opéra", mérite une réhabilitation partielle. La grande force provient d'une maîtrise parfaite des techniques de mise en scène (steadycam, meurtres suivis au plus près avec la mention pour le coup de revolver tiré dans un judas). L'opéra est le théâtre de toutes les audaces artistiques pour un artiste qui avait alors renoncé depuis déjà quelques films à ses couleurs criardes qui ont fait sa réputation ("suspiria", "inferno"). En adoptant un ton plus réaliste, Argento se permet d'aller nettement plus loin dans les meurtres qui sont graphiquement très gores. C'est malheureusement en s'éloignant du lieu principal de l'action (l'opéra donc) que le réalisateur est beaucoup moins en forme. A ce titre, le final tombe dans le nanar le plus grotesque (l'héroïne aurait très bien pu se retrouver dans "Heidi") avec cette ambiance champêtre à laquelle on a dû mal à croire.

Bien qu'inscrit dans une atmosphère qui se veut réaliste, Dario ne peut s'empêcher de glisser quelques éléments fantastiques, comme lorsque les corbeaux sont utilisés pour démasquer le tueur. Aussi improbable que soit cette scène, l'on est envoûté par la réalisation d'un maître en pleine possession de ses moyens. Mais si "Terreur à l'opéra" a surtout marqué les esprits (en plus du meurtre par le Judas qui a inspiré récemment "saw 2"), c'est par l'utilisation très spéciale d'aiguilles sous les yeux pour que Betty puisse regarder les meurtres. Les gros plans sur les yeux ainsi contraints à rester ouverts ne peut provoquer que de l'effroi, tant le réalisateur insiste sur une partie de notre anatomie des plus sensibles et fragiles.
La jeune soprano se trouve ainsi soumise au caprice de son "tortionnaire" qui joue avec ses sens à sa guise. A un moment donné, il lui bandera les yeux pour qu'elle ne le regarde pas. Le tueur se la joue Deus Ex Machina, jouant avec sa proie à sa guise.

En dehors de ses qualités techniques, "Opera", accumule les défauts et les tares qui malheureusement l'empêche d'être le grand giallo qu'il aurait dû être. La faute à une interprétation d'acteurs incapables de transmettre la moindre émotion (même la pourtant douée Daria Nicolodi se demande ce qu'elle fait là à débiter des mots passe-partout!) et à des réactions incohérentes. Pourquoi Betty ne semble pas réagir plus que ça aux meurtres qui l'entourent? Comment le tueur a pu s'échapper d'une pièce fermée? Autant de questions qu'il vaut mieux éviter de se poser sous peine de déception car l'enquête policière n'est guère passionnante ni crédible. D'ailleurs, Argento n'a jamais vraiment été à son aise dans le domaine de la cohérence scénaristique mais se rattrape par ses foudroyances horrifiques. Là où sa réalisation sera terne par contre comme pour "card player", l'échec est flagrant. La force d'Argento réside dans sa capacité à camoufler cette faiblesse par son génie créatif, ce qui est encore le cas en ce qui concerne "Terreur à l'opéra".

Grâce à sa maîtrise parfaite d'un genre qu'il a vu naître, l'auteur de "les frissons de l'angoisse" arrive à distiller une sourde angoisse en reprenant les habitudes du giallo: tueur ganté, souvenir enfoui au plus profond de la mémoire.... L'illusion est quasi parfaite même si la dernière partie fait retomber l'impression du mauvais côté. Une fin bâclée pour une conclusion un peu trop attendue et prévisible. Inégal sur sa durée, "Terreur à l'Opera" reste néanmoins à voir pour la maestria des meurtres et une réalisation à la hauteur des ambitions de son sujet: Lyrique!

OPERA | OPERA | 1987
OPERA | OPERA | 1987
OPERA | OPERA | 1987

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Note
4
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Gérald Giacomini