Thriller
Michael Jackson's thriller
Il fait nuit, un jeune garçon se gare non loin d'une épaisse forêt et charme sa petite amie dans sa belle bagnole. Il lui offre une bague, ils s'échangent des mots doux quand soudain, la pleine lune apparaît bien distinctement dans le ciel. Catastrophe ! Le jeune homme est pris d'un terrible mal de ventre et se transforme rapidement en loup-garou. Une fois devenu complètement lycanthrope, il poursuit sa girl friend dans les bois…
Grand monsieur oeuvrant spécialement dans la comédie loufoque, John Landis est pourtant rattaché souvent au fantastique tout au long de sa carrière. Surtout que le mélange surprenant entre son humour ravageur et le fantastique nostalgique qu'il affectionne particulièrement, marche du tonnerre.
Si sa comédie cultissime "Hamburger Film Sandwich" ne démontrait pas grand-chose de ce coté-là (excepté cette fausse publicité proposant de garder toujours vos proches décédés dans votre famille !!!), son film parodique "Shlock" (alias le tueur à la banane ?!?) posait déjà quelques bases en en détournant le mythe du singe tueur avec une dérision savoureuse.
Mais la consécration de cette rencontre de genres, c'est l'inoubliable "Loup-garou de Londres" qui avait la très grande particularité de juxtaposer un humour discret et hilarant, avec un sérieux pourtant bien présent. Landis ne retrouvera cependant pas cette alchimie dans son néanmoins sympathique "Innocent Blood" où l'humour finit par prendre trop l'écran et fait valdinguer les frissons aux oubliettes. Il donnera également un autre clin d'œil au genre, le temps d'un film co-réalisé avec quatre autres réalisateurs, "Cheeseburger Film Sandwich" où on découvrait un monstre du Loch Ness reconvertit en Jack l'éventreur (!?!!). On pourrait egalement découvrir encore ses talents pour le fantastique dans les deux sketches qu'il a confectionné pour "La quatrième Dimension : le film".
Jusque là sous-exploité ou presque, le clip vidéo va prendre un autre tournant dès les années 80, se transformant même en court-métrage musical. Une histoire est construite, on met en place un budget important, des acteurs, des grands réalisateurs même et petit à petit on rajoute des scènes non musicales, un générique de début et de fin, une exploitation en vidéo… La recette va être très bien utilisée par Jackson qui allonge la durée de son clip, devenant ainsi plus long que la durée de le chanson : ici le vidéo clip fait 13 minutes.
La recette va être reprise par de nombreux artistes comme Mylene Farmer (et j'y reviendrais sûrement) qui transforme justement ses clip en véritable courts, explosant les durées habituelles (la chanteuse rousse est allée jusqu'à 17 minutes de clips pour "Pourvu qu'elles soient douces").
Faisant partie de l'album du même nom, "Thriller" se retrouve donc avec John Landis comme réalisateur et bénéficie d'une attention toute particulière : un making-of sera commercialisé avec le clip en vidéo, des produits dérivés vont s'accumuler autour forcement, et il marquera l'histoire du petit écran pendant longtemps, devenu sans doute la référence number one des clips horrifiques, aujourd'hui assez prolifiques grâce aux nouveaux courants musicaux comme le métal ou le hard rock.
Le clip a donc un générique de fin, répétant (inutilement ?) la grande scène de danse avec les zombies, et rajoutant au passage un plan final non présent au départ dans le clip, une sorte de dernier clin d'œil au spectateur (ou plutôt téléspectateur).
Landis installe son intro non musicale en plaçant ce qui semble être un hommage aux films d'horreur très 50's voire carrément au "Loup Garou de Londres" en transformant Jackson en loup-garou bien touffu (d'ailleurs il pousse le même cri que le loup du "Loup-garou de Londres"). A ce titre, Rick Backer (le maquilleur le plus doué en ce qui concerne les lycanthropes et les singes) s'occupe de la très belle transformation aboutissant à un excellent résultat rapprochant plutôt le loup-garou d'un chat-garou ! Mais c'est bien foutu, alors on en profite !
Surprise, cette séquence (un ado se transforme en lycanthrope et attaque sa compagne) est en fait un film que matte Michael Jackson (enfin le héros de l'histoire avec sa petite amie, qui s'effraie pour pas grand-chose et finit par se casser de la salle. Le cinéma se nomme ainsi "Thriller" et fourmille de détails croustillants comme la présence des affiches du "Masque de la mort rouge" et de "Schlock", et il faudra savoir que le cinéma ou se situe cette courte scène est le même qui est utilisé dans "Hamburger Film Sandwich" dans le sketch hilarant du cinéma très… tactile.
La chanson peut démarrer, et c'est en passant dans un cimetière, que les protagonistes vont réveiller accidentellement les morts (Pourquoi ? on s'en fout, nous sommes dans un clip), guidés ainsi par la voix caverneuse de Vincent Price. Difficile de ne pas être marqués par la plus belle scène de résurection après celle de "L'enfer des zombies" ou des morts-vivants décharnés et fumant, sortent en masses de leur tombes. Traitée dans le plus total sérieux, la séquence est réellement inquiétante, et nous offre ainsi une galerie de morts-vivants on ne peut plus réaliste.
Sur ce coup je vais être franc : ce sont sans doute les plus beaux zombies qu'on ai jamais vu, offrant un amalgame parfait entre ceux de Romero et de Fulci. Ils sentent la terre remuée, la mort, ils ont tous une personnalité, un look et un état de décomposition différents, et ils foutent vraiment les boules ! Car même si Jackson pourra danser avec eux dans la séquence charnière du clip, ils gardent toujours leur sérieux et continuent d'émettrent une certaine terreur. Le pire va culminer lorsque, la scène de danse terminée, ils abandonnent leurs instants de danseurs pour poursuivre dans une baraque isolée la pauvre girl friend du héros. De quoi marquer pendant un bon moment les jeunes spectateurs tombant par hasard dessus.
Tourné lorsqu'il n'avait pas reçu les infâmes coups de scalpels qui l'ont véritablement transformé à présent, le clip permet à Michael Jackson de jongler parfaitement avec son physique, tout d'abord celui assez courant de "gentil" (personne n'a oublier son manteau rouge très eighties) pour ensuite vraiment effrayer lorsqu'il se retrouve grimé en zombie, affichant un regard froid qui crève instantanément l'écran. Certains me diront qu'il fait encore plus peur de nos jours , mais n'exagérons rien, ici il fout vraiment la trouille et même les multiples transformations opérées dans "Ghosts", ne dégageront pas cette impression de malaise.
Petit clin d'œil encore à "La nuit des morts-vivants" lors de l'assaut final contre lesquels la pauvre héroïne ne pourra pas faire grand-chose. Au final d'ailleurs, "Thriller" ne compte pas énormément sur l'humour délirant de Landis, qui préfère l'insérer à petite doses comme dans "Le loup-garou de Londres" : le zombie perdant son bras, la surprise finale, les morts-vivants dansant mollement dans un coin de l'écran… Des petites doses d'humour qui permettent de mieux faire ressortir le coté horrifique du clip et d'en faire une petite référence du genre. Ce n'est pas pour rien que la VHS du clip s'est extrêmement bien vendue à l'époque, eh oui forcement.
Preuve que Landis aime toujours les clins d'oeils, on pourra remarquer un gros plan sur un zombie peu rassurant sortant d'une crypte. Pourquoi ? Et bien parce qu'un certain Rick Backer se cache derrière…