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AMNESIA : THE DARK DESCENT | AMNESIA : THE DARK DESCENT | 2010
Jaquette originale
AMNESIA : THE DARK DESCENT | AMNESIA : THE DARK DESCENT | 2010
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Amnesia : the dark descent

Amnesia : the dark descent

AMNESIA : THE DARK DESCENT | AMNESIA : THE DARK DESCENT | 2010

Arrivé à l’écran du menu où résonne un sombre violoncelle, les auteurs / développeurs suédois de Frictional Games nous montrent d’emblée là où l’on va finir : dans les catacombes. Et on en finit plus de finir, puisque le jeu nous prend à la moitié d’une histoire où les extrêmes sont déjà de mise : vous venez de prendre une potion probablement infecte qui vous a foutu par terre ; vous vous relevez, titubant, dans un château fort, entouré d’une sombre forêt par une nuit d’orage, et apprenez que vous êtes l’artisan de votre propre oubli. Bienvenue dans Amnesia : The Dark Descent.

Les nouvelles ne sont pas bonnes

Pauvre de vous, qui n’étiez déjà pas bien vaillant dans Penumbra (cf article) : vous voilà amnésique dans une château allemand fort reculé, par une nuit qui va être bien longue, et vous ne couperez pas aux détails croustillants de l’histoire que vous cherchiez à oublier. Le parcours se fera, une nouvelle fois, à la Lovecraft en plus stressé ; c’est-à-dire que cette descente ne se fera pas sans regarder en permanence derrière votre épaule, puisque l’on vous annonce que vous êtes poursuivi, que vous avez tout essayé, et que c’est peine perdue pour tenter quoique ce soit contre cette force inconnue et hostile.
Il y a davantage de posture dans Amnesia, qu’il n’y en avait dans Penumbra : on vous énonce le principe d’emblée, on guide vos émotions à grands renforts de bruitages apeurés et autres halètements, et on vous met le nez dans la viande très explicitement par le biais de notes et autres souvenirs sonores. Voilà pour les points négatifs : moins fin, plus de guidage, plus de sang, plus de cris.

Destin funeste

Néanmoins cette apparente surenchère n’a pas que des mauvais côtés : Amnesia est une aventure courte mais intense, à fort caractère littéraire. On visite dans un premier temps des pièces début du siècle décorées avec un goût certain. On y lit beaucoup, des souvenirs reviennent au cours de la visite des lieux et on ne sait trop discerner d’où proviennent les voix qui vous parviennent de temps à autre : fantômes, vies spirituelles parallèles, simple folie ? Vous serez amené à le savoir que vous le vouliez ou non puisque les auteurs ont introduit un compteur de santé mentale à votre inventaire. Certes, ce n’est pas un baromètre, mais vous comprendrez assez vite que trop de temps dans le noir, trop de face à face et de rencontres inpromptues avec l’ennemi vous amèneront droit au noir total... et définitif.
C’est la grande nouveauté du jeu alliée à un progrès technique incontestable : textures, lightings. Tout est plus beau, plus précis, le noir est plus noir, et comble du charme, votre lampe éteinte, vos yeux s’adaptent progressivement au manque de lumière, comme en vrai. L’effet est saisissant et c’est aussi le bon côté des innovations qui permettent l’identification au personnage. Voilà qui justifie la qualification “sombre” de cette descente : plus que l’évolution dans des cachots sombres et humides, c’est la marche forcée vers le passé et l’inévitable cheminement vers la folie, qui quoique vous fassiez, vous accompagne tout au long du jeu.

Grincements

Impossible de ne pas parler du son tant il est partie prenante dans l’intrigue. Lorsque les souvenirs vous reviennent, ce sont des vagues de situations et d’évènements qui vous envahissent : voix off, bruitages, cris atroces masculins comme féminins : vous irez jusqu’au bout de l’horreur en son comme en lumière. Outre les éléments sonores de ces “souvenirs” artificiellement effacés, le design sonore des lieux est également des plus impressionnants : grincements, grattements d’insectes, dont la provenance encore une fois est incertaine, passages bref de rongeurs, bruits sourds et hurlements réguliers et inhumains de la force qui vous poursuit, le tout dans une musique environnementale des plus sordides. Mikko Tarmia, qui avait déjà oeuvré dans Penumbra nous livre une partition beaucoup plus ample et majestueuse, avec une utilisation intelligente des silences, où seuls pêchent quelques passages émotionnels un peu pénibles car plus académiques en terme de musique de jeu vidéo. On assiste du coup à des instants forts grandiloquents un peu hors de propos. Rassurez vous toutefois, si ces moments sont mal dégrossis, il restent assez rares. La vraie surprise réside en la présence de morceaux véritablement aériens aux notes presques apaisantes, petites perles savamment disséminées tout au long du parcours, soulignant la fragilité psychologique de votre personnage. Profitez-en bien, le fond du propos reste de nous faire comprendre l’omniprésence et l’intangibilité du mal, et votre rôle actif dans la plongée vers le macabre.

Gameplay

Tout le charme Frictional Games, pour peu que l’on aime chiner dans des environnements mystérieux où la peur n’est qu’une série de sales moments à passer est encore bien là malgré tout. Si l’on a affaire, comme il se doit, à des gardes à peine humanoïdes et des forces improbables qui nous poursuivront à chaque rencontre, on ne les verra encore une fois que rarement plus que par surprise au détour d’un couloir, quand on les verra… rappelant ainsi un caractère bien Lovecraftien : l’invisible, impalpable, indicible. On retrouve donc le sel des poursuites à l’arrache dans le noir, au sein d’un environnement inconnu, qu’il faudra bien finir par explorer à rebours, en prenant garde à sa lampe. Nous accompagnent à nouveau également les énigmes et l’économie d’objets : les ressources vous manqueront si vous n’y prenez pas garde, et n’oubliez pas que si la lumière vous rassure, elle attire également l’ennemi... Le compromis est permanent et rarement en votre avantage.
Bien qu’un peu moins sollicitée que dans la production précédente, c’est toujours votre imagination qui fera le travail le plus important via un des ressorts les plus fondamentaux : la peur du noir, au sein duquel on va s’enfoncer. Mention spéciale à la cave de stockage et aux cachots... Les édifices brinquebalants, faits de planches, de chaises et de caisses entreposées sont également de rigueur, et par la même occasion les même clics frénétiques en situation d’urgence, lorsqu’il s’agit d’interagir avec un élément, bien que poursuivi par une chose.
Rien de bien neuf donc en termes de gameplay, par rapport au précédent, mais c’est le principe des bonnes recettes : votre préoccupation une fois de plus va être d’apprendre, de survivre, et de résoudre.

Viande fraîche au kilo

Même si les auteurs ont manifestement voulu en faire “plus”, il semblerait, sans toutefois que cela nuise vraiment à l’expérience de jeu, que ce choix soit à double tranchant : apparition scriptées, effets sonores, histoire sordide et sanglante... On vous met un peu de force dans la peau d’un personnage, là où Penumbra vous apprivoisait insidieusement. La violence et le glauque insoutenable de certains passages paraissent parfois de trop, s’ils n’étaient pondérés par une histoire plus écrite, plus romancée, et entièrement plongée dans le noir dans tous les sens du terme. Ici la fragilité du personnage est renforcée par son passif qui justifie le compteur de santé mentale et lui sera narré par lui-même, alors que transi d’effroi, il devra cheminer tant bien que mal vers le fond. Avec l’interaction, la fragilité du personnage est encore une fois le coeur d’Amnesia, à l’instar des narrateurs lovecraftiens qui peinent souvent à raconter leur histoire. Rongé par la peur, la culpabilité et le sentiment d’impuissance, ce château sera votre purgatoire. Pour peu qu’on se laisse happer, l’atmosphère crispante d’Amnesia : The Dark Descent vous laissera sans voix.

AMNESIA : THE DARK DESCENT | AMNESIA : THE DARK DESCENT | 2010
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Note
4
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