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GERAD DAMIANO - LES PEAUX LA CHAIR LES NUITS | GERAD DAMIANO - LES PEAUX LA CHAIR LES NUITS | 2018
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GERAD DAMIANO - LES PEAUX LA CHAIR LES NUITS | GERAD DAMIANO - LES PEAUX LA CHAIR LES NUITS | 2018
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Date de parution (France)
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166

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Non
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français

Gerad Damiano - les peaux la chair les nuits

Gerad Damiano - les peaux la chair les nuits

Tout le monde, une fois dans sa vie (occidentale et civilisée), a entendu parler de Gorge profonde. Peu de gens, en revanche, ont eu l’idée (ou l’envie) d’aller voir de quoi il retourne concernant cet olibrius (ex coiffeur pour dames) qui conçoit des pornos extravagants dans lesquels, tel Alfred Hitchcock, John Landis ou Mel Brooks, il apparaît soudain au détour d’un plan, voire envahit des séquences entières.
Cette étude documentée se propose donc de valoriser Gerard Damiano, cinéaste cantonné dans un ghetto de genre, mais dont l’univers, obstinément, se structure de film en film, laissant transparaître une véritable identité cinématographique, un point de vue original et vibrant qui mérite qu’on s’y attarde sans a priori réducteur.

L'AVIS :

Que vient faire un livre sur Gerard Damiano dans les pages d'Horreur.com vous demandez-vous ? Le réalisateur fait des pornos, certes, mais pour ceux qui ont vu les principaux, osez prétendre que certaines histoires, certains décors ou certaines images ne relèvent pas du "fantastique" serait un peu osé !

L’auteur, Marc Bruimaud, connait son sujet, c’est le moins que l’on puisse dire. Totalement intarissable sur le cinéma (porno) de Damiano, il nous livre une analyse très poussé sur l’univers de ce dernier, sur le pourquoi de son cinéma. Car Gerard Damiano n’est pas un simple réalisateur de films X. Non, tout comme Andrew Blake ou Michael Ninn dans les années 90, Damiano a un vrai regard d’auteur et pour lui, réaliser un porno, c’est faire du cinéma haut de gamme. Il trouvera d’ailleurs désolant le passage de la pellicule au format vidéo. Qui plus est, Damiano cherche a casser les codes, les règles du genre. Filmer des corps qui fusionnent entre eux comme si on filmait ses vacances à la mer, très peu pour lui.

Marc Bruimaud va donc nous décortiquer ce qui fait l’originalité des films de Damiano, qui a hissé le film porno au rang d’œuvres d’art la plupart du temps : « ombres chinoises au générique d’Alpha Blue […], décors géométriques en suspension […], panneaux vidéos géants en arrière-fond parasitant l’action […], invraisemblables cadrages à la limite de l’abstrait […], crudité entomologique des viols au lavement […], composition en clair-obscur sur fond d’adagio […], montages alternés d’actions non-synchrones […], écrans découpés, flash-back, flash-forward, ellipses fulgurantes […], ralentis, filtres colorés, jeux sur les focalisations et la profondeur de champ […] faux raccords volontaires ou raccord dans le flou ente séquences narrativement disjointes […], inserts connotatifs, déploiement formel imaginatif… »

Bref, vous l’avez compris, le cinéma de Damiano, c’est un cinéma expérimental. Tout est propice au test, tout donne lieu à des essais de style, de placement de caméra, pour briser la monotonie des productions pornos « classiques », se contentant de suivre les ébats des acteurs sans chercher une quelconque sophistication de l’image.

L’analyse de Marc Bruimaud en première partie d’ouvrage nous invite donc, sur une vingtaine de pages, à découvrir l’univers de celui qu’on surnommait « le Bergman du porno ». Un univers étonnant, fantasmatique, féerique, qui nous offre des visions ou des décors dignes d’un film fantastique bien souvent mais qui se révèle aussi sordide et nihiliste parfois. Tels sont les films de Damiano. Le texte est précis, ciselé et les nombreuses annotations en bas de page sont une source inépuisable de renseignements pointus et éclairants.

La seconde partie du livre est consacré à la filmographie détaillée du réalisateur de "Gorge Profonde", de "Devil in Miss Jones", de "Story of Joanna" ou de "Odyssey". Chaque film est présenté par son résumé puis par une analyse plus ou moins longue, le tout avec reproductions en noir et blanc d’affiches ou de jaquettes vidéo. Quand les films sont introuvables, l’auteur a la franchise de dire qu’il ne les a pas vue mais nous livre tout de même des renseignements sur ces derniers. Un travail de fourmi donc que ce passionné nous transmet avec affection et sincérité.

A noter que Damiano s’est aventuré une fois hors du porno avec "Legacy of Satan", évidemment présenté dans cet ouvrage.

La fin de l’ouvrage nous offre une biographie du réalisateur ainsi qu’un cahier photos en couleurs. Enfin, on a droit à des témoignages traduits d’Annie Sprinkle, à un interview de l’acteur Hank Azaria, qui interprète Gerard Damiano dans le film Lovelace puis à divers extraits d’interviews de Damiano lui-même. Pour conclure, l’auteur a réuni des extraits de critiques paru dans divers livres et magazines.

Avec cet ouvrage, le premier en France, Marc Bruimaud a réussi son pari : faire connaître Damiano et donner envie aux lecteurs de découvrir son œuvre. Du travail de qualité.

* http://www.jacquesflamenteditions.com/335-gerard-damiano-les-peaux-la-c…

Note
5
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Stéphane Erbisti