Règne animal - Le

Règne animal - Le

Alors qu’une mutation fait des ravages sur le Globe et transforme certains humains en animaux, François et son fils Emile tentent de sauver leur mère de ce mal aussi inquiétant qu’énigmatique. Après avoir déménagés de manière temporaire dans une nouvelle région afin de se rapprocher du centre de traitement dans lequel sera transférée la mère de famille, nos deux amis vont rapidement se retrouver entourés de créatures mi-homme mi-animal…

Règne animal - Le | Règne animal - Le | 2023

L'AVIS:

"Le règne animal". Qui n’a pas entendu parler de ce film en fin d’année 2023 ?
Ce n’est d’ailleurs pas compliqué : deux films fantastiques français ont trusté les réseaux sociaux et plus particulièrement les pages dédiées au cinéma de genre en fin 2023, à quelques semaines seulement de la Cérémonie des Césars. Le premier, nous vous en avons déjà parlé car il s’agit du très sympathique "Vermines" de Sébastien Vanicek que nous vous avions fait découvrir en sortie d’avant-première. Le second est ce long-métrage de Thomas Cailley qui s’offre dans son casting Romain Duris et Adèle Exarchopoulos mais également dans son équipe des artisans provenant du même groupe d’effets spéciaux que celui ayant officié sur le film d’araignées précédemment cité.

Mais aux Césars, c’est bel et bien "Le règne animal" qui l’emportera (avec "Anatomie d’une chute"). Prix de La Meilleure Musique Originale, Prix du Meilleur Son, Prix de La Meilleure Photographie, Prix des Meilleurs Costumes et Prix des Meilleurs Effets Visuels : une vraie pluie de récompenses s’est abattue sur le film de Thomas Cailley. Et c’est fichtrement mérité tellement le film fait dans l’esthétisme comme nous le verrons un peu plus tard.

"Le Règne animal", c’est ce qui peut s’appeler un petit ovni dans le paysage fantastique français. Un film qui, même s’il présente quelques similitudes avec les X-Men (si si…), s’avère très original et porte en lui de très nombreux messages. Bien que le récit soit tout en allégories et pensées philosophiques, le récit peut aussi bien se lire de manière très linéaire, sans chercher à extrapoler quoique ce soit. Une écriture sur plusieurs niveaux qui ravira donc tout type de public, ce qui explique également (entre autres) son succès et les multiples louanges qui lui sont faites.

En tout cas, quand on décide d’explorer un peu plus l’écriture du film de Thomas Cailley, on ne peut éviter certaines thématiques et messages portés à l’écran ici :

Les valeurs de la famille et les difficultés à faire le deuil (bien que la matriarche ne soit pas décédée, cette mutation l’a clairement isolée des siens et cela semble irréversible) sont des thématiques qui sautent aux yeux bien évidemment dans "Le Règne animal".

Ensuite, le rejet d’autrui et la méfiance ou la peur de ce qui est différent (les mutations animalières perpétrées sur certains humains les isolent clairement – physiquement, moralement, socialement - et nous renvoient directement dans notre Monde réel au racisme ou à l’handicap qui crée des malaises, des moqueries, de la peur, bref de la discrimination) sont des allégories clairement mises en avant dans ce long-métrage. Un véritable pamphlet sur la tolérance que voilà.

Autre niveau de lecture encore, certains remarqueront également dans "Le Règne animal" de forts messages écologiques en imaginant des causes possibles à ces mutations ou tout simplement en voyant l’Humain face à sa bestialité et son indifférence vis-à-vis de certaines espèces animales traquées car parfois effrayantes, un poil gênantes et jugées dangereuses… bref souvent incomprises et tout simplement non tolérées sur le même sol. Mais n’oublions pas qu’en chacun de nous sommeille un animal, animal qui remonte ici à la surface (le chemin inverse du fameux Homme qui descend du singe) et fragilise alors l’Homme qui perd sa place dans la chaine, devient sauvage et surtout le traqué et non plus le chasseur (des rapports de forces qui s’inversent).

Enfin, je finirais sur une dernière thématique (mais elles sont encore nombreuses comme le soulignait l’équipe du film en interview sur la Croisette quand le film a été présenté en ouverture de la sélection « Un certain regard » en 2023) : celle de la transition vers l’âge adulte pour notre jeune Emile, ce dernier vivant alors un vrai rite/parcours initiatique dans lequel tantôt il souffrira, tantôt il évitera les embûches, tantôt il développera des sentiments encore inconnus jusque là (il faut bien un peu d’eau de rose…), mais toujours avec en fond cette fameuse mutation animalière qui touche l’Homme (sa mère n’est finalement jamais bien loin, la génétique non plus…).

Emouvant (ce final de toute beauté qui m’a tiré des putains de larmes), poignant, énigmatique (on ne saura finalement pas grand-chose de ces mutations mais elles servent parfaitement le récit pour en faire une sorte de drame sous fond de fantastique et de science-fiction), immersif, parfois effrayant et au contraire amusant (le personnage de Fix l’Homme-oiseau joué par le très bon Tom Mercier ou encore de la gendarme interprétée par la star montante Adèle Exarchopoulos n’y sont pas étrangers et apportent de la légèreté et un petit brin d’humour dans le récit… pour mieux nous prendre à revers dans nos sentiments dans les minutes qui suivent), "Le Règne animal" dépasse les 2h mais cela ne se ressent pas. Jamais ennuyeux et ne présentant réellement aucun temps mort, le scénario est fort habile, nous balance d’émotions en émotions sans jamais tomber dans l’excès. C’est subtil, c’est propre.

Mais si tout cela fonctionne à merveille dans le film de Thomas Cailley, c’est aussi parce que le casting est à la hauteur du projet. En effet, le jeu d’acteurs est remarquable à tous les niveaux. Et parce qu’il est normal d’en parler, on en parle : le duo père-fils interprété avec énormément de justesse par la paire Duris/Kircher nous offre là un sans-faute. Outre notre star du "Péril jeune" et de "L’anacoeur" qui nous touche fortement dans ce rôle émouvant du patriarche, c’est surtout vers ce jeune homme, Paul Kircher, qui interprète de façon impressionnante le personnage d’Emile, un ado à la limite de l’autisme qui va vivre de grands bouleversements dans sa vie et nous faire passer du rire aux larmes avec beaucoup de réussite.

Alors oui, n’oublions pas de revenir bien évidemment sur ce qui a fortement contribué au succès du film de Thomas Cailley : le visuel et le sonore si on peut dire ainsi. 6 Prix aux Césars, tous ayant un lien avec l’esthétisme du film comme dit en début de critique.

Les effets visuels tout d’abord n’ont pas à rougir des certains blockbusters américains : ici, aucune fausse note dans les Sfx, qu’ils soient numériques, animatroniques ou qu’il s’agisse des nombreux maquillages. Le Body-Horror est au cœur de nos mutations et on se régale devant ces nombreuses créatures diverses et variées, toutes soignées par l’équipe en charge des effets visuels (4 millions d’euros environ ont été mis dans les Sfx sur les 15 millions qu’a coûté approximativement le film).
Et n’oublions pas les magnifiques décors naturels, parfois sublimés par une photographie au top avec des effets de lumières (par temps de pluie, d’orage…). Un visuel très soigné !

Enfin vient l’aspect sonore. Des musiques parfaitement choisies tout au long du film et surtout cette nature environnante : les sons de la nature, les bruitages animaliers… "Le Règne animal" est sacrément immersif !

En définitif, nous sommes bel et bien devant ce que j’appelle un chef d’œuvre. Un film magistral, une claque filmique comme on en voit assez peu dans le cinéma fantastique. Je mets assez rarement une note maximale sur le site en raison soit de quelques imperfections résiduelles soit d’une trop faible prise de risque (un manque d’originalité, un scénario un peu fainéant par moments, quelques clichés évitables…) souvent remarquées dans beaucoup de très bons films. Ici ce n’est pas le cas : c’est propre, intelligent, original, immersif et franchement niveau émotions on a bien été bousculés ! Chapeau !
(Et je ne dis pas cela parce que c’est français (et belge) hein !)

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Bande-annonce
Note
5
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David Maurice