Affiche française
Bon apôtre - Le | Apostle | 2018
Affiche originale
Bon apôtre - Le | Apostle | 2018
Un film de
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oui

Bon apôtre - Le

Apostle

Après avoir appris que sa sœur a été kidnappée dans le but d’obtenir une rançon, son frère décide de se rendre sur une île lointaine où cette dernière serait retenue par une inquiétante secte…

Bon apôtre - Le | Apostle | 2018

L'AVIS:

Gareth Evans, réalisateur et scénariste de "The raid" et "The raid 2" notamment, revient avec un film dans un tout autre genre, loin de l’action intense des deux films mentionnés mais plus proche volontiers de films comme "Midsommar" ou "The wicker man".
Vous l’aurez donc compris, et ce rien qu’en lisant le résumé écrit en début de chronique, nous avons affaire ici à un film de secte avec même un brin de folk horror (mais bien moins prononcé que dans les deux films cultes cités en exemples ci-avant).

Particulièrement friand de ce genre de production, ce fut donc avec beaucoup d’espoir que je me lançai dans le visionnage de "Apostle" ("Le bon apôtre" chez nous), un film estampillé Netflix.
Mais alors que vaut réellement ce long-métrage signé par celui qui avant cela avait donné un grand coup de fouet au cinéma d’action avec sa franchise de "The raid" ? Réponse ci-dessous…

Aucun doute là-dessus : tous les éléments sont réunis ici pour nous plonger au cœur de ce que l’on appelle une secte communautaire. Décortiquons ensemble tout cela :

Nous avons affaire ici à une secte communautaire, menée par trois membres fondateurs dont un faisant office de « gourou » (le prophète Malcolm), rassemblant ses fidèles dans l’église du village insulaire pour diffuser sa propagande religieuse, outil de communication indispensable pour retourner le cerveau de ces personnes hautement influençables (tous cherchant une nouvelle vie après avoir été des ennemis de la Société).

Une Société dont l’on parle d’ailleurs fréquemment comme d’une menace pour cette communauté qui vit éloignée de cette dernière sur cette île perdue au large des côtes du Pays de Galles. Car, comme dans toute secte communautaire, il convient de se mettre à l’écart de la société, être à distance des « messieurs Tout le Monde », afin que le gourou puisse retourner le cerveau de ses fidèles sans être gêné par la civilisation avoisinante. Pour se faire, l’isolement doit être parfaitement respecté et c’est ainsi que nous comprenons aisément qu’il n’est pas simple d’accéder à cette île (il est nécessaire d’avoir reçu une invitation sur un petit carton pour monter sur le bateau menant à cette « terre d’accueil ») et encore moins d’en repartir. A ce niveau, la sensation d’isolement et d’impuissance est parfaitement retranscrite dans "Le bon apôtre". Un bon point !

Comme tout bon film de secte aux rites païens qui se respecte, nous retrouvons la fameuse déesse que nous honorons par des offrandes pour avoir des meilleures récoltes. A ce titre, nous avons ici une façon bien gorasse de générer des offrandes pour la déesse des cultures, à savoir l’utilisation d’une sorte de grand hachoir dans lequel nous mettons les ennemis de la communauté ou des personnes sacrifiées qui sont alors broyés afin d’obtenir de la viande humaine déchiquetée plus facilement consommable par notre déesse.
Déesse qui apparait d’ailleurs sous forme humaine (chose peu commune dans les films de secte et de folk horror, la déesse étant souvent représentée par le soleil ou des structures en bois…). Avec un physique de mort vivant (yeux vitreux, peau vieillie…) plus que d’une déesse soit dit en passant, cette dernière parait comme emprisonnée dans une structure végétale, très affaiblie/âgée et donc très facilement manipulable par ses geôliers qui sont à la tête de cette secte communautaire. A ses côtés, nous avons une sorte d’esclave lui apportant de la nourriture et faisant ainsi office de bourreau à ses heures perdues (un personnage effacé pendant une bonne partie du film mais qui saura se montrer dangereux le moment venu pour notre héros…)

Enfin, que serait une secte sans son gourou. Incarné par Michael Sheen (Lucian dans la saga "Underworld", Aro dans la saga "Twilight"…) le prophète Malcolm distille sa propagande avec sérénité. Un être calme mais qui sait se montrer persuasif et sans pitié quand il s’agit de se débarrasser des ennemis de sa communauté. Un personnage plutôt bien écrit et parfaitement incarné par l’acteur gallois. C’est d’ailleurs l’une des forces du film de Gareth Evans : les personnages sont correctement interprétés (bien que pas toujours bien écrits…) par un casting de bonne facture.

Violent, le film de Gareth Evans l’est assurément. Qu’il s’agisse des scènes de mises à mort ou de tortures qui sont particulièrement intenses, "Le bon apôtre" saura même faire détourner le regard du spectateur lors d’une scène de mise à mort particulièrement prenante dans laquelle nous avons droit à une perforation de boîte crânienne qui ferait rougir de nombreux films d’horreur. Les appareillages utilisés (dont le grand hachoir décrit en début de chronique pour récolter des chairs humaines déchiquetées visant à nourrir la déesse des cultures), tout en bois et en ferraille, sont des machines fabriquées et utilisées non pas pour torturer mais bel et bien pour donner la mort dans d’atroces souffrances.

Gareth Evans aime l’adrénaline que procurent certaines scènes qui secouent et à ce titre son film recèle de petits moments bien rythmés où les coups portés font mal et les mises à mort marquent les esprits. Voilà de quoi rajouter un peu d’angoisse en ce qui concerne la virulence et l’aspect dangereux de cette communauté vivant à l’écart de la civilisation sur cette île paumée au milieu d’une vaste étendue d’eau.

Mais à l’inverse de films comme "The wicker man", "Midsommar" et autre "The sacrament", nous pourrons peut-être reprocher au film de Gareth Evans de ne pas susciter suffisamment cette angoisse et ce sentiment d’insécurité que nous pouvions ressentir pleinement à la vision des longs-métrages cités juste avant.

En effet, cette sensation de peur et d’effroi vis-à-vis de cette intrigante communauté se fera surtout ressentir dans la dernière partie du film, quand nous seront présentés le grand hachoir et la table de sacrifice.
Un film qui vire soudainement dans l’horreur, après deux éléments majeurs dans le récit [début du spoiler] : notre héros qui est démarqué et la découverte d’une histoire d’amour entre deux jeunes amants de la communauté qui batifolaient, un délit réprimandé par la doctrine de la secte qui va donner lieu aux premiers grands moments forts/chocs du film qui basculera alors dans l’horreur et le viscéral [fin du spoiler].
Avant cette bascule, "Le bon apôtre" se suit certes agréablement mais sans grand moment mémorable (tout bascule véritablement quand notre héros se retrouve nez à nez dans la flotte avec la déesse ayant soif de sang). Nous ne ressentons d’ailleurs pas de réelle tension, nous avons peu d’éléments qui nous pousseraient à croire que nous sommes en danger (si ce n’est les deux personnes tuées en début de récit, une par erreur et l’autre parce qu’elle voulait tuer le prophète au nom du roi). A ce titre, nous sommes bien loin du côté intrigant/inquiétant permis par la lourde atmosphère des puissants "Midsommar" et "The sacrament" où nous ressentions ce mal-être, cette sensation désagréable d’être tout le temps épié et cette angoisse/peur d’être soudainement pris à partie par la communauté endoctrinée.

Nous pourrons également d’ailleurs reprocher au film de Gareth Evans un scénario quelque peu confus par moments. [Attention ce qui suit contient des spoilers]

Ainsi, pour faire suite à ce qui est écrit juste avant (le basculement dans l’horreur), nous ne comprenons pas bien par exemple pourquoi l’un des membres fondateurs de la secte de l’île devient soudainement l’unique leader et donc l’ennemi numéro un pour notre héros venu libérer sa sœur de cette communauté insulaire. Exit Malcolm et place à Quinn : un passage quelque peu rapide qui manque d’explications et de profondeur dans le personnage de Quinn (certes affecté par le fait que sa fille ait été mise enceinte), même si l’on comprend depuis quelques temps déjà que cette secte est affectée par une déesse qui, du fait de son affaiblissement (elle apparait comme épuisée et affamée, en témoigne la façon dont elle se jette sur la moindre goutte de sang humain), ne parvient plus à générer de belles récoltes, de l’herbe bien verte pour le pâturage (d’ailleurs, nous apprenons que l’argent de la rançon demandée pour libérer la sœur de notre héros servirait à nourrir la communauté qui ne peut plus autant compter sur sa déesse). Une situation qui fragilise la secte en question et pourrait mettre à mal la doctrine religieuse propagée, chose que reproche justement Quinn qui prend le leadership soudainement après avoir découvert que sa fille était enceinte (la goutte d’eau pourrait-on dire, l’écart de trop dans cette communauté qui le fait se révolter contre la façon qu’a Malcolm de diriger et d’enliser la communauté...)
La déesse également demeure une interrogation dans le film : alors que nous la voyons patauger dans une sorte de galerie souterraine à la poursuite de notre héros, cette dernière sera ensuite montrée comme affaiblie, retenue par de la végétation qui l’en fait prisonnière… Nous avons l’impression d’avoir deux personnages différents d’un moment à l’autre du film, un peu perturbant…
Même chose enfin pour notre héros : avec son air inquiet quand il ne fait pas une mine patibulaire et sa mise à l’écart courante en début de récit, comment celui-ci a-t-il pu passer inaperçu pendant ses premières heures sur l’île alors que les pères fondateurs de la secte cherchaient une « brebis galeuse au sein du troupeau » ? Comment se fait-il qu’ils n’aient pas pensé à lui plus tôt ? Bref…
[Fin des spoilers]

Certes, cela reste quelques exemples pour expliquer le scénario un peu décousu et peut-être pas assez travaillé du film "Le bon apôtre" mais cela ne gêne toutefois en rien le visionnage de ce métrage qui narre avec beaucoup de qualités, comme vu dans cette chronique, cette histoire de secte païenne.

Au final, "Le bon apôtre" est un bon film sur les sectes communautaires. Pas aussi puissant que des "Midsommar" (un de ces « nouveaux films cultes » à visionner en version longue), "The wicker man" (un classique) et "The sacrament" (film de Ti West peu connu en France) que je cite inévitablement à plusieurs reprises dans cette chronique mais Gareth Evans parvient tout de même à créer une atmosphère particulière, pas aussi angoissante que les films précédemment cités mais suffisamment travaillée pour nous tenir en haleine du début à la fin, ne serait-ce que pour savoir comment notre héros va se sortir de ce piège insulaire.

Sans conteste l’un des meilleurs films de genre financés par la plateforme Netflix qu’il m’ait été donné de voir à ce jour, loin des tapages médiatiques de certaines œuvres faisant l’effet d’un pétard mouillé une fois visionnées. A découvrir donc !

Bon apôtre - Le | Apostle | 2018
Bon apôtre - Le | Apostle | 2018
Bon apôtre - Le | Apostle | 2018
Bande-annonce
Note
4
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David Maurice