SKINNER
SKINNER
Un homme solitaire débarque dans une petite ville et loue une chambre chez Kerry et Geoff. Très discret, Dennis Skinner -c’est son nom- erre la nuit dans les rues de la ville avec un sac rempli de couteaux… Loin derrière, une femme aux allures de droguée le suit…
L'AVIS:
Film de serial killer des années 90 quasi inconnu du Grand Public, "Skinner" regroupe pourtant quelques noms bien connus. On mentionnera plus particulièrement ses deux personnages principaux interprétés par Theodore - dit Ted - Raimi (le frère cadet de Sam et Ivan, vu dans de nombreux films tels que "Darkman", "Mort sur le grill", "Le monde fantastique d’Oz" et "Jusqu’en enfer" de son frère Sam, "Candyman", "Wishmaster" ou encore les sagas de son frère "Evil dead" et "Spiderman" sans oublier son rôle de Joxer dans la série "Xena la guerrière") dans la peau de Dennis Skinner ainsi que Traci Lords (grande star du cinéma pornographique des années 80 ayant œuvré également dans des téléfilms, séries télé et séries B en pagaille) dans la peau d’Heidi, la femme traquant notre tueur en série.
Perdu de vue par de nombreux cinéphiles fans de fantastique, cette petite série B horrifique a été remise dans la lumière par Extralucid Films qui le sortit en 2022 sur support laser dans son catalogue ainsi qu’en partenariat avec le magazine Mad Movies.
Avec sa musique pesante donnant cette ambiance lourde peu joyeuse, son atmosphère sombre et glaciale (les jeux de couleurs parfois bleutées renforcent également cela), "Skinner" nous plonge rapidement dans son histoire de serial killer où l’humour n’a nullement sa place. Le cadre est également bien choisi, entre vieux quartiers aux murs tagués servant de terrain de jeux (parfois inondés) aux dealers et aux prostituées, vieille chambre défraichie à louer dans laquelle séjourne Dennis Skinner, hôtel miteux où réside Heidi ou encore des endroits lugubres et craspecs dans lesquels il amène ses victimes pour les découper (sa tanière qu’il a choisie au cœur de la grande usine où il travaille).
Nous sommes d’ailleurs face à un serial killer fort bien interprété par un Ted Raimi inquiétant et ne laissant pas si facilement paraitre sa folie et son penchant pour les prostituées (mais pas que…) aux rares personnes qu’il côtoie (la propriétaire de sa chambre et le veilleur de nuit de l’établissement où il travaille notamment). Et pourtant nous sommes ici en la présence d’un véritable psychopathe sanguinaire, totalement barje (une folie qui date de l’enfance comme il l’explique dans le film), découpant et démembrant de manière chirurgicale ses victimes pour ensuite porter leurs visages (petit clin d’œil à un certain Leatherface) et autres membres tels qu’avant-bras et jambes. Et une fois habillé de ses grands morceaux de peau, le voilà comme habité par sa victime, parlant et gesticulant comme cette dernière de son vivant ! (On retiendra notamment l’une des meilleures scènes du film dans laquelle Dennis Skinner poursuit une jeune femme avec sur lui la peau d’un gros black débile et fan de boxe qui lui servait de collègue quelques temps avant)
[Petit bémol dans ce personnage de Dennis Skinner : sa fascination pour l’eau. On voit bien durant le film que notre tueur en série est captivé par l’eau et les écoulements mais on n’a jamais l’explication à cela…]
Mais le plus dingue dans tout cela est que même la personne traquant Dennis Skinner pour l’empêcher de commettre d’autres méfaits (à savoir le personnage d’Heidi interprété par une Traci Lords bien énigmatique) semble bien barje également, refusant l’aide que certains veulent lui apporter pour le neutraliser et n’hésitant pas à les violenter (elle manie bien les armes blanches aiguisées) pour s’assurer qu’elle sera la seule à stopper notre serial killer. Vêtue de son grand imperméable et de son chapeau, elle se fond dans la nuit pour traquer sans relâche Dennis Skinner, un homme qu’elle connait très bien pour avoir été l’une de ses victimes avec qui il n’avait pas pu « finir le travail » il y a 5 ans en arrière, laissant sur la jeune femme de profondes cicatrices l’ayant totalement défigurée et handicapée. Habitée par sa vengeance personnelle, droguée à donf pour lui faire oublier la douleur de sa chair meurtrie, rien ne semble vouloir l’arrêter : un combat de fêlés s’annonce !
On regrettera toutefois que ce personnage soit quelque peu décevant, un peu mou du genou dans une première moitié de film et s’enlisant dans des monologues anti-Skinner sans grand intérêt et limite ridicules… Heureusement, ce personnage sera bien plus intéressant (même si l’interprétation demeure laborieuse, Traci Lords étant capable de bien mieux) dans la seconde moitié du film, surtout dans le final très bis qui nous sera proposé.
Les effets spéciaux sanguinolents ne sont certes pas toujours clairs, voire hors-champs pour certains (on nous en montre crescendo), mais on imagine bien le travail opéré à chaque nouvelle victime. Les quelques scènes de découpe de cadavres sont quant à elles suffisamment gores et sanglantes pour plaire aux amateurs d’hémoglobine. Signés par les studios KNB que l’on ne présente plus aujourd’hui, grands artisans des années 80-90 notamment ("Evil dead 2", "Une nuit en enfer", "Freddy sort de la nuit", "Re-animator 2", "L’antre de la folie", "Scream", Wishmaster"…), nous aurons droit à quelques sympathiques passages où l’on dépèce des victimes, retire un visage entièrement, découpe dans les peaux, recoud certains morceaux pour en faire un costume… Oui, notre psychopathe écorcheur ne fait pas dans la dentelle et nous montre là tous ses talents chirurgicaux et couturiers !
Dommage que le film soit scénaristiquement assez pauvre, suivant un fil conducteur bien simple sans grande surprise au programme (mais bon rien de surprenant dans ce genre de film), si ce n’est peut-être un final joyeusement bordélique (même Dennis Skinner change de visage, virant dans l’hystérie et nous rappelant que nous sommes dans de la bonne bisserie) qui clôture le film de bien belle façon !
Nous sommes bien là dans une histoire de tueur en série comme il en existe pas mal au cinéma et où nous suivons les méfaits d’un déséquilibré qui, malgré une folie indéniable, parvient encore à éprouver des sentiments pour son hôte ou encore à rigoler avec le veilleur de nuit de son usine avec qui il sympathise plutôt que de vouloir découper dans leurs chairs comme il l’aurait fait avec de nombreuses autres personnes. Comme quoi, Dennis Skinner est certes un taré psychopathe que rien ne semble vouloir arrêter mais il a encore la capacité de différencier ses victimes de ses amis. Encore faut-il être du bon côté quand on le rencontre…
En ressort une production flirtant entre la série B et le téléfilm du fait de cette réalisation quelque peu en dents de scie, certains passages n’étant pas toujours bien filmés, certains inserts sanglants nous parvenant tels des flashs soudains pour faire des transitions d’une séquence à l’autre…
Au final, "Skinner" est une bonne petite bisserie des années 90 nous présentant un serial killer bien timbré comme il faut, écorchant ses victimes pour arborer leurs peaux et principalement leurs visages à la manière d’un Leatherface. Sombre, glauque et glaciale, l’ambiance est l’un des points forts de notre film dans lequel nous retrouvons un Ted Raimi vraiment bon dans le rôle-titre.
L’aspect téléfilm se fait parfois ressentir (bien qu’il n’en soit pas un) mais qu’importe : on passe un bon petit moment devant ce film certes assez simpliste dans sa narration mais suffisamment entraînant pour que l’on suive ce dernier sans ennui.