Child's play : la poupée du mal
Child's play (2019)
La multinationale Kaslan Corporation a lancé sur le marché une poupée de haute technologie nommée Buddi. Véritable succès planétaire, la poupée s’arrache comme des petits pains auprès des enfants. Dans l’usine fabriquant le fameux jouet, un salarié se fait licencier et décide pour se venger de trafiquer le circuit électronique de l’une des poupées, désactivant notamment les paramètres de sécurité de cette dernière.
Une poupée qui va arriver dans un foyer pour faire la connaissance du jeune Andy...
L'AVIS:
Quelle ne fut pas ma colère quand j’appris la mise en chantier d’un remake de "Jeu d’enfant" de Tom Holland. Sorti en 1988, ce long-métrage nous permit de faire la connaissance de ce qui deviendra une icône des films d’horreur des années 80-90 : la terrifiante poupée tueuse Chucky. Après deux premiers volets réussis ("Chucky 2 - la poupée de sang" demeure encore aujourd’hui l’un de mes films de chevet assurément), la saga montra un petit relâchement avec un troisième épisode plus fade et moins effrayant avant de frapper un grand coup en 1998 sous l’impulsion de Ronny Yu (qui donnera également naissance cinq ans plus tard à "Freddy contre Jason") avec le fameux "La fiancée de Chucky" qui marqua un tournant radical dans la saga qui se vit injecter une bonne dose d’humour et ne manqua pas de séduire notamment le jury du festival de Gérardmer qui lui décerna le Prix Spécial du Jury. Suivirent ensuite trois nouvelles suite de 2004 à 2017, plus ou moins réussies il faut bien l’avouer.
En toute fin d’été 2018, une photo nous montrait le nouveau visage de Chucky qui allait revenir dans les salles obscures en Juin de l’année suivante. La poupée anciennement appelée « Good Guy » (« Brave Gars » par chez nous) s’appelle à présent Buddi, en référence aux poupées My Buddy créées en 1985 par Hasbro et qui inspireront trois ans plus tard les créateurs de notre fameuse poupée mise en scène par Tom Holland. Elle présente d’importantes similitudes avec notre poupée horrifique préférée imaginée par Messieurs Holland et Mancini mais il faut bien l’admettre : cette nouvelle modélisation de Chucky en 2019 ne fait pas autant mouche, elle « sent bon le plastique » pourrait-on même dire.
Qu’importe, laissons une chance une fois de plus à un remake, même si cette vague de resucées ne semble pas vouloir s’éteindre, à en croire que le monde du cinéma est à la recherche de scénaristes prolifiques...
Plus un reboot qu’un remake d’ailleurs, ce nouveau "Child’s play" n’est finalement pas un aussi mauvais film que ce à quoi je m’attendais. En fait, le gros souci est justement d’en avoir fait un "Chucky" / "Child’s play" plutôt qu’un énième film de jouets meurtriers, ce qui aurait été préférable (mais bon, il faut bien trouver le moyen d’attirer les spectateurs...). Forcément, cela pousse le public à la comparaison entre les versions (1988 et 2019) et la désillusion est grande quand nous voyons ce Chucky bien moins percutant, terrifiant et sadique que ce qu’il a été dans les débuts de la saga, notamment dans les deux premiers opus.
Exit l’esprit de Charles Lee Ray, machiavélique tueur en série adepte de vaudou, qui habitait notre poupée dans le film de Tom Holland, Chucky est aujourd’hui une poupée ayant tout simplement subi une détérioration de ses circuits électroniques, ce qui la rend indéniablement moins effrayante et menaçante qu’elle ne l’était auparavant dans la saga originale.
Ici, Chucky n’est qu’un « jouet qui déconne » et n’est plus animé par cette énergie dévastatrice de Charles Lee Ray, cette envie de faire couler le sang. Non, ici l’unique mobile qui pousse Chucky à perpétrer des meurtres est de se rapprocher de son meilleur ami, Andy. « Je ferai n’importe quoi pour mon meilleur ami » dit la poupée. Et effectivement, ce seront un chat ayant eu le malheur de griffer Andy ou encore un beau-père envahissant et une voisine trop proche du jeune garçon qui vont se frotter à Chucky.
L’angoisse et la terreur ne sont plus vraiment au rendez-vous non plus ici, le film se voulant assez paresseux quand il s’agit de mettre en place une ambiance pesante. Nous suivons par exemple les frasques d’une bande d’enfants se servant de Chucky pour faire des blagues dans le quartier, les déboires d’un policier roi de la blague avec sa mère envahissante... Bref l’heure semble plus à la rigolade et au Grand Public plutôt qu’à l’horreur pure qu’étaient les deux premiers volets de la saga. Dommage...
Alors que le film de Tom Holland critiquait ouvertement l’industrie du jouet et de la publicité tout en nous plongeant dans une relation des plus difficiles entre Andy et son entourage, cette nouvelle version du norvégien Lars Klevberg va prendre pour cibles les nouvelles technologies et les dangers qui en émanent. Malheureusement, il est fort dommage de constater lors du visionnage de ce "Child’s play (2019)" que le scénario n’ait pas été un peu plus fouillé au vu du potentiel qu’offraient ces nouvelles technologies qui ne sont finalement pas suffisamment exploitées...
Un final facile et sans réelle surprise, une absence de scène mémorable (comme le fut par exemple cette séquence de terreur durant laquelle la mère d’Andy constatait que la poupée fonctionnait sans pile dans le long-métrage de Tom Holland sorti en 1988 ! Brrrrr), un manque cruel d’intérêt durant une bonne première moitié de film, des apparitions de notre poupée sans créer la moindre palpitation... Nous ne pouvons cacher notre déception en ce qui concerne le scénario et cette réalisation semblant avoir délaissé le côté horrifique du projet.
Restent toutefois quelques séquences gores, maigre consolation pour les fans de la saga et notamment de la tétralogie initiale. Mais il faut bien reconnaître que le sang éclabousse dans cette version où des meurtres à la scie circulaire, à la tondeuse ou encore au bon vieux couteau des familles se succèdent pour notre plus grand plaisir (et encore plus quand l’hémoglobine vient recouvrir le visage d’une fillette venue acheter sa poupée Buddi !)
L’humour noir si propre à la saga est par ailleurs toujours bien présente (on appréciera entre autres ces phrases entendues et retenues par la poupée et qu’elle ressort lors de ses meurtres : « C’est l’heure connasse », « Vengeance pour Tupac ! »...), même si elle est quelque peu noyée dans un trop-plein d’humour enfantin dans la première moitié du film durant laquelle nous suivons une bande d’enfants se servir de Chucky pour faire des blagues...
Au final, nous n’avons pas eu là le bon gros mauvais film pressenti mais tout simplement un petit film de jouets meurtriers regardable si l’on accepte de se dire que finalement ce n’est pas vraiment un opus de la saga des "Chucky". Comparer ce film à notre cher "Child’s play" de 1988 génère indéniablement des incompréhensions, des déceptions voire mêmes des énervements chez les plus fanatiques de Chucky d’entre nous.
Alors, ne ressassez plus les scénarios des meilleurs épisodes de la saga des "Chucky" (1,2 et 4 ?) et laissez-vous emporter par ce long-métrage nous narrant les méfaits d’une poupée ayant subi une dégradation de son circuit électronique et non animée par l’esprit d’un serial-killer sadique. Un petit film avec ses qualités (des bonnes scènes gores, quelques personnages attachants, des clins d’oeil au cinéma fantastique des années 80, un humour noir sympathique) mais également ses nombreux défauts (une première partie très enfantine et sans trop d’intérêt, une ambiance ratée, un jouet peu terrifiant, un scénario pas suffisamment fouillé, un final des plus basiques...)
Une petite moyenne pour un film assez moyen donc...
Teaser :