Nope
Nope
Les habitants d’une vallée perdue du fin fond de la Californie sont témoins d’une découverte terrifiante à caractère surnaturel.
L'AVIS :
Je pense pouvoir affirmer sans trop de risques qu'après ses deux premiers films ("Get out" et "Us"), Jordan Peele est un réalisateur particulièrement clivant, génie pour les uns et surcôté pour les autres. De mon côté, j'ai trouvé à peu près les mêmes qualités et les mêmes défauts dans ces deux oeuvres : un point de départ très intriguant, une première moitié de film passionnante, une mise en scène très soignée... puis une seconde partie retombant comme un soufflet, et me laissant une impression finale assez mitigée. Autant dire que je n'avais aucune attente ni aucune appréhension avant d'aller voir Nope... mais aussi la chance d'avoir été largement épargné par la campagne promotionnelle française, révélant beaucoup trop d'éléments de l'intrigue.
Car Nope, dans sa première partie, cherche largement à entretenir le mystère autour du phénomène se déroulant au-dessus du ranch Haywood. Dans une démarche citant de façon assez évidente les "Rencontres du troisième type" et "Dents de la mer" de Steven Spielberg, Peele joue sur l'invisible et sur les éléments extérieurs pour indiquer que la menace est présente : des chevaux en panique, bruits (terrifiants) de hurlements, un fanion semblant descendre d'un nuage, et des perturbations électromagnétiques. On ne devine ainsi que progressivement la nature du phénomène... avant de nous apercevoir, en même temps que les personnages, qu'il n'est pas ce qu'il semblait être.
On se retrouve ainsi devant deux parties bien distinctes : la première, où l'on tente d'appréhender l'inconnu, et la seconde où cet inconnu est identifié, et où les personnages vont tenter de lui survivre... mais aussi de capitaliser dessus. Peele en profite alors pour nous livrer des séquences très impressionnantes (l'attaque du ranch), la seconde partie offrant le contrepoint spectaculaire de la première, plutôt lente et posée.
Le réalisateur en profite également pour tourner en dérision la recherche permanente du buzz, de la séquence qui fera parler - et enrichira son auteur. Parfois de façon très évidente (le journaliste de TMZ), parfois de façon plus subtile avec le personnage de Jupe (incarné par Steven Yeung, que l'on connaît pour ses rôles dans "Mayhem" et surtout "The Walking dead"), ex-enfant star marqué par une expérience traumatisante, qu'il choisit désormais d'utiliser à son profit. On sent également toute l'importance du concept même d'image, autant dans la volonté d'immortaliser l'évènement que dans l'amour que porte le réalisateur pour son art, citant les travaux de Eadweard Muybridge, clamant sa préférence pour les effets spéciaux à l'ancienne, se passionnant pour ces petites mains oubliées ou rejetées par la machine holywoodienne.
A mes yeux, si le film semble diviser encore plus que les précédents, Nope réussit même là où "Get out" et "Us" échouaient : il va au bon de son concept, et propose une seconde partie très réussie, jusqu'à un final visuellement superbe (on sent que l'influence de l'animation japonaise, et principalement "Evangelion", sur Peele, qui en profite aussi pour glisser un clin d'oeil à "Akira"). Un film que j'ai vraiment hâte de revoir, notamment pour mieux apprécier les moments où Peele se joue de nous, mais aussi parce qu'au-delà de la narration et du visuel du film, j'ai largement apprécié le duo Kaluuya (parfait dans le rôle de ce frère taciturne) - Palmer (rayonnante dans celui de la soeur extravertie).